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je déclare n’avoir pas signé, c’est uniquement pour rendre hommage à la vérité et non pour faire amende honorable. » Interrogé, M. Raspail répondit : « Je vous donnerai la lettre et non l’esprit je vous donnerai deux fois trois lettres Non, non ! » M. Flocon opposa spirituellement la conduite de la Chambre des pairs, qui ne refusait pas des conseils aux défenseurs, à la conduite de la Cour des pairs, qui avait refusé des défenseurs aux accusés. MM. Jules Bernard, David de Thiais, Auguste Blanqui, Franque, Antony Thouret, Frédéric Degeorge, Bergeron, Gazard, Armand Barbès, Grouvelle, Voyer d’Argenson, Laurent, Gervais (de Caen), Ferdinand François, Rittiez, Demay, Dornez, ou refusèrent de répondre catégoriquement, on firent suivre leurs réponses de réserves dédaigneuses et intrépides. L’assemblée commençait à être fortement remuée, lorsque vint le tour de M. de Lamennais. Car il était là, perdu dans la foule des vaincus, cet homme dont le nom remplissait l’Europe, ce prêtre puissant qui avait proposé à la papauté, comme but de sa mission divine, la sanctification de la liberté et l’affranchissement du genre humain. Quand on l’interrogea, tous les regards se fixèrent sur l’homme illustre, avec un profond sentiment de curiosité et de respect. Lui, le front pâle, la tête un peu penchée sur son corps petit et frêle, il répondit d’une voix qui n’était qu’un souffle, mais qui fit tressaillir les juges : « Ce qui se passe en ce moment, Messieurs, contient de graves enseignements qui ne doivent être perdus ni pour la France ni pour l’Europe. Ils ne le seront pas !