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ment, il faut, pour s’avouer vaincu, une noblesse de caractère et une supériorité d’intelligence dont peu d’hommes sont doués. Ceux qui voulaient éluder la solidarité de la lettre redoublèrent de clameurs, et bientôt il devint manifeste qu’on serait obligé de leur céder.

M. Trélat avait suivi en silence la marche de cette triste querelle. Il en prévit le dénoûment ; et il résolut d’affronter toute la responsabilité, en se déclarant seul coupable. Ce ne fut, toutefois, qu’après une lutte intérieure pleine d’anxiété qu’il s’y décida. Il aimait tendrement sa femme ; sa famille réclamait impérieusement son appui ; et, pour tout dire, il avait à craindre que son parti ne lui sût pas gré d’un tel sacrifice. L’inspiration première l’emporta. Mais c’était M. Michel (de Bourges) qui avait rédigé la lettre ; c’était donc à lui qu’appartenait l’honneur d’un dévoûment devenu nécessaire : il invoque son droit ; et, dans une lutte de générosité céder étant impossible, MM. Michel (de Bourges) et Trélat conviennent qu’ils se présenteront tous les deux à leurs ennemis, le premier comme auteur, le second comme publicateur de la lettre. En conséquence, ils écrivent au président de la Chambre des pairs :

« Monsieur, la lettre dénoncée à la Chambre des pairs par le ministère publie est de l’un de nous, M. Michel (de Bourges) elle a été publiée par un autre, M. Trélat ; les signatures apposées au bas de la lettre ne sont que fictives. Il était urgent d’envoyer quelques mots de consolation et d’encouragement à nos amis en prison. Nous avons pris sur nous de faire imprimer, à la suite de nos noms, les noms de collègues qui, nous en étions sûrs, ne nous désavoueraient pas. Aujourd’hui que cette lettre donne lieu à des poursuites, il est de notre devoir de faire con-