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pu être utiles à leurs amis, et protestent de toute l’énergie de leur conscience contre l’abominable iniquité qui va être consommée à la face de la nation ! »

Cette fermentation des esprits faisait prévoir des résistances terribles : elles éclatèrent, dans l’audience du 6 mai, avec un emportement et un ensemble qui accablèrent les juges. M. Godefroi Cavaignac avait réclamé la parole pour protester contre l’arrêt de la veille. On la lui refuse. Aussitôt, d’un mouvement spontané, les accusés se lèvent ; et l’œil en feu, le bras étendu : « Parlez, Cavaignac, parlez ! » Les gardes municipaux sont debout, ils reçoivent l’ordre d’avancer ; mais ils restent frappés de stupeur. Les cris redoublent. Le président, interdit, passe alternativement de l’obséquiosité à l’impatience ; il se consulte avec le grand référendaire, avec M. de Bastard, vice-président ; puis, il annonce à la Cour qu’il faut qu’elle se retire pour délibérer. À ces mots, les pairs se précipitent vers la salle du conseil, en proie à un trouble invincible. Alors, au tumulte succède le plus profond silence. Au dehors, les troupes sont sous les armes. Après quatre heures d’attente solennelle, la Cour rentre en séance. Des conclusions sont prises contre M. Cavaignac, et la garde municipale entraîne les accusés.

Le lendemain, même tempête, et plus violente encore. Un avocat, Me Crivelli, avait commencé un discours pour demander la récusation des pairs qui s’étaient chargés de l’instruction, lorsqu’il fut interrompu par les accusés. La réclamation de Me Crivelli était fondée ; car il était contraire, et aux dis-