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réquisitions qui tendaient a déshonorer leur ministère, le Moniteur publia, le 30 mars (1835), une ordonnance qui investissait la Cour des pairs et son président, à l’égard des avocats de tous les pouvoirs qui appartiennent aux Cours d’assises et aux présidents de ces Cours.

Tels sont les entraînements de l’arbitraire ! Une fois lancé dans cette voie fatale, un pouvoir essaierait en vain de se modérer, il faut qu’il avance toujours, dût-il voir, à chaque pas, se creuser autour de lui un nouvel abîme. Les accusés écrivirent au barreau de Paris :

« On ne nous oppose plus seulement le pouvoir discrétionnaire d’une cour spéciale ; c’est le bon plaisir qui statue, par disposition rétroactive, sur des questions judiciaires. Ainsi, ce n’est pas assez que nous soyons soumis à tous les caprices d’un tribunal exceptionnel, sans appel, sans contrôle. Si le mépris de toutes les lois ne lui suffit pas pour nous enlever jusqu’à notre dernière garantie, une ordonnance intervient, l’arbitraire s’ajoute à l’arbitraire, toutes les iniquités se liguent. La politique, disent effrontément nos ennemis, ne doit pas manquer à la justice Nous ne manquerons pas, nous, à notre devoir, et nous nous demandons, Messieurs, de remplir le votre avec la fermeté qui convient à votre profession, avec la promptitude que les circonstances exigent. »

A d’aussi mâles accents, tout le barreau s’émut. Il n’y eut qu’un cri, parmi les avocats, sur l’inégalité de l’ordonnance du 30 mars. Le 6 avril (1835), le conseil de l’ordre s’assemble extraordinairement, et une commission composée de MM. Philippe Dupin, bâtonnier de l’ordre, Parquin et Odilon Barrot, rédige une délibération dont voici les conclusions :

« Sans se préoccuper de l’illégalité de l’ordonnance, sans examiner si le mandat qui leur est donné est obligatoire, les avocats