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prochain numéro. Nous ne disons ici que notre impression première, et nous la mettrons de côté pour introduire dans la plus pénible, la plus irritante des réfutations, le calme qu’il ne faut jamais perdre, même en face de la plus basse iniquité. »

Cet article était injurieux à l’excès et sortait même par là des habitudes littéraires du National. La Chambre des pairs s’en offensa, et, sur la proposition de M. Philippe de Ségur, vainement repoussée par MM. Dubouchage, de Lanjuinais, Pontécoulant et Excelmans, elle traduisit le journal à sa barre, dans la personne du gérant, M. Rouen. M. Rouen ayant aussitôt demandé à être assisté dans sa défense par Armand Carrel, alors prisonnier, l’autorisation qu’il réclamait lui fut accordée ; et, le 15 décembre, ils parurent l’un et l’autre devant la Chambre des pairs.

M. Rouen ne prononça que quelques paroles, pleines, d’ailleurs, de modération et de noblesse. Puis Armand Carrel se leva. Sa physionomie trahissait tout ce qu’il y avait d’émotion dans ses pensées, et sa contenance exprimait une sorte d’urbanité virile et légèrement dédaigneuse. Il commença en ces termes : « Je ne sais, Messieurs les pairs, si vous vous étonnez d’être nos juges ; nous nous demandons, quant à nous, par quel renversement de principes, par quelle suite de changements inaperçus nous sommes devenus vos justiciables… Qu’il soit resté dans un coin obscur du code de la presse, sans que personne s’en doutât, l’attribution si tentante pour les deux Chambres de se faire justice elles-mêmes des écarts d’une discussion libre, nous ne le nions