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de prédilection. Les noms de MM. Decazes et de Bassano cessèrent en effet d’être prononcés; mais, si le conflit n’existait plus, l’aigreur survivait. Impatient de se débarrasser du ministre de la guerre, M. Guizot pressa M. Thiers de s’unir à lui dans ce but, lui représentant que le maréchal était, dans le Conseil, une cause permanente de division à la Chambre, un embarras. Et M. Thiers d’hésiter. « Un maréchal de France est à ménager, » disait-il d’un air pensif. Il consentit, néanmoins, à se prêter, au moins passivement, aux répugnances de son collègue et ce fut avec son assentiment que M. Guizot partit pour le château d’Eu, où le roi l’avait devancé.

Le roi tenait au maréchal Soult, d’abord parce qu’il avait en lui un ministre aussi docile que laborieux, ensuite parce qu’il le jugeait seul propre à appuyer fortement le trône sur l’armée. D’ailleurs, il s’agissait d’offenser un homme qui avait marqué dans la guerre, même à une époque où Napoléon rendait tout obscur autour de sa gloire et Louis-Philippe avait coutume de dire en parlant du maréchal Soult: « Il me couvre. »

Par tous ces motifs, les démarches de M. Guizot étaient hasardeuses. Le roi veut s’en expliquer avec M. Thiers; et, sur un courrier qu’on lui dépêche en toute hâte, le ministre de l’intérieur se rend auprès de son collègue et auprès du roi. La discussion fut longue; mais M. Thiers s’étant fait fort de décider le maréchal Gérard à entrer dans le Cabinet, si, préalablement, le maréchal Soult en était exclu, le roi céda. Le président du Conseil fut donc censé avoir donné volontairement sa démission. M. de