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Le 14 avril (1834), le carnage de la rue Transnonain fumant encore, les dignitaires du royaume allèrent féliciter le roi, et M. Guizot parut à la tribune pour insulter, de là, des ennemis abattus. Le 15, M. Persil, garde des sceaux, présenta au vote de la Chambre des députés une loi draconnienne contre les détenteurs d’armes de guerre. Le même jour, une ordonnance, qui violait la Charte, transforma la Chambre des pairs en Cour de justice ; et quatorze millions de crédits extraordinaires furent demandés pour maintenir l’effectif de l’armée à 360, 000 hommes et 65, 000 chevaux. Demande étrange assurément ! Un pouvoir qui se disait si fermement appuyé sur les intérêts et la volonté du peuple avait-il besoin de tant de soldats pour le contenir ? Mais les ministres se pressaient de mettre à profit l’étourdissement public. Affectant des terreurs que ne justifiait plus le danger, ils entouraient la royauté du mensonge de leur sollicitude, l’entretenaient dans le désir d’usurper la dictature, et lui donnaient, le cas échéant, la nation à fouler aux pieds.

L’impulsion une fois imprimée, la réaction devint furieuse, par les empressements même de la bassesse. Dans l’entraînement du succès et de leurs passions, les vainqueurs avaient résolu de lier à l’idée d’un vaste complot tous les mouvements enfantés par le mois d’avril. Faute immense, et qui mettait parfaitement en relief la médiocrité des hommes placés à la tête des affaires ! Car, en réunissant devant la Chambre des pairs constituée en Cour de justice, pour les faire juger solennelle-