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il avait été prévenu, dès le matin, de leur réunion, il en connaissait le lieu, et le chemin était libre jusqu’à eux. Quels motifs mystérieux portèrent M. Gasparin à s’abstenir ? Faut-il croire qu’il fut retenu par la crainte de commettre un acte arbitraire, alors qu’il s’agissait d’une guerre civile à conjurer dans une ville qu’on inondait de soldats ?

Une consigne, d’ailleurs, avait été donnée qui n’indiquait pas de grands scrupules de légalité : « Feu sur quiconque paraîtra dans les rues, » avait-on dit aux soldats. Consigne terrible, qui ne fut pas générale il est vrai, qui n’exista que pour certains quartiers, mais qui là où elle fut observée, produisit d’inconcevables scènes d’épouvante et d’horreur ! Qui le croirait ? Pour que des juges et des avocats pussent sortir, même en robes, du tribunal où les avait appelés l’affaire des mutuellistes, et cela sans s’exposer à devenir victimes de l’affreuse consigne il fallut qu’un officier supérieur vînt les avertir, et qu’un ordre tout spécial protégeât leur retraite !

Déjà, en effet, Lyon était en pleine guerre civile. Stationnées sur les principaux quais, sur les principales places, et comme animées par un courant électrique, les troupes faisaient feu de toutes parts. Le canon grondait sur la place Louis-le-Grand. La mitraillade avait commencé, renversant sur le pavé hommes, femmes, enfants.

Comment résister à une attaque aussi brusque, aussi violente ? Car les communications ont été coupées par les soldats, et le plus grand nombre des sectionnaires, des ouvriers, se trouvent isolés, par-