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une époque où beaucoup de républicains en étaient encore à renfermer le salut du peuple dans la substitution d’un consul à un roi, lui, légitimiste converti de la veille, il annonçait déjà la réforme sociale. Les anciens, nul ne l’ignore avaient décoré les poètes du nom de vates, qui signifie prophète. M. de Lamartine fut donc un poète dans la plus noble acception du mot. Car, un jour, secouant avec courage les préjugés d’une moitié de sa vie, et déserteur du pouvoir, c’est-à-dire de la force, il devait tenir les hommes attentifs au bruit de son illustre défection, et montrer la route lumineuse qui s’ouvrira devant les générations à venir.

En votant la loi contre les associations, M. de Lamartine avait cédé à la crainte de voir les sociétés politiques livrer bataille au gouvernement et entasser ruines sur ruines. Il ne comprit pas que cette bataille si fort redoutée par lui, la loi qu’il votait en allait donner le signal. Dès ce moment, en effet, tous les glaives se trouvèrent, en quelque sorte, à moitié tirés du fourreau, et d’un bout de la France à l’autre, ce ne furent plus que préparatifs de guerre.

Or, l’imminence d’une crise n’avait jamais trouvé le pouvoir en proie à plus de divisions. La guerre aux portefeuilles était poursuivie avec ardeur, en attendant qu’une guerre plus terrible éclatât. Enveloppés d’intrigues, deux membres du Cabinet étaient à la veille de succomber, et le duc de Broglie, en butte à une animosité persévérante et secrète, allait lui-même sortir du Conseil.

Une demande de vingt-cinq millions adressée au gouvernement français par le gouvernement des