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de l’humanité, je suis son homme, malgré vos ministres et votre loi. Esclave de toutes les lois justes, ennemi de toutes les lois iniques, entre les persécuteurs et les victimes je ne balancerai jamais. Je ne connais pas de pouvoir humain qui puisse me faire apostasier Dieu, l’humanité, la France. Pour obéir à ma conscience, je désobéirai à votre loi. »

Parmi le& députés qui votèrent avec le gouvernement, il y en eut un qui ne le fit qu’après avoir déclaré tout haut qu’il entendait voter la loi présentée, uniquement comme loi d’urgence, comme loi d’inquiétude publique. Ce député était nouveau venu aux affaires ; mais il lui avait suffi de deux discours pour faire saluer en lui un des princes de la parole. Son génie, chacun depuis long-temps en connaissait la moitié. Ce député était M. de Lamartine.

Dans M. de Lamartine, l’homme extérieur appartenait tout entier à la classe aristocratique : car il avait les traits fins, les formes allongées, une dignité facile, une magnificence de gentilhomme, et cette élégance sans effort qui se compose de riens exquis. Seulement, le commerce de la poésie l’ayant accoutumé à la pompe du discours, il ne parlait point la langue des salons, langue vive et légère et d’une futilité charmante. Qu’un pareil homme fut démocrate, quelques-uns s’en étonneront. Rien de plus vrai, pourtant. Et si la démocratie n’avait pas eu son premier culte, c’est qu’elle ne lui était apparue que dans la poussière soulevée par un demi-siècle de combats ; c’est qu’il l’avait vue sanglante, en