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et l’inonde de tous les côtés, se répandant sur les quais, sur les places, dans les rues, partout, et y portant les passions dont elle était animée. Mais déjà le bruit des cloches d’alarme, le retentissement du canon, l’odeur de la poudre, cette vue du sang, toujours si contagieuse, avaient propagé en tous lieux l’esprit de révolte. Tout autour de Lyon, livré à d’irrésistibles ardeurs, on vit se soulever presqu’au même instant les quartiers des Broteaux, de la Guillotière et de Saint-Just. Le comte Roguet voulant empêcher la population ouvrière des Broteaux de fondre sur Lyon par le pont Morand et le pont Lafayette, fit établir une batterie sur le port Saint-Clair. Et pendant que les boulets, passant par-dessus le Rhône, ravageaient ce malheureux quartier, des fabricants postés à toutes les fenêtres des maisons qui bordent le quai du Rhône dirigeaient de là sur les Broteaux un feu continuel et meurtrier. La lutte, au reste, était devenue générale. La ville était couverte de barricades. Tous les postes avaient été désarmés l’un après l’autre ; dans la galerie de l’Argue, un républicain, Drigeard-Desgarnier, avait distribué gratuitement au peuple les fusils de chasse de son magasin ; trois boutiques d’armuriers avaient été enfoncées une partie de la garde nationale s’était rangée du côté des insurgés et les avait munis de cartouches ; enfin, les ouvriers qui avaient commencé le combat avec des bâtons, ne se battaient plus qu’avec des fusils. Au jardin des Plantes, une poignée d’insurgés repoussa plusieurs compagnies. Une bande de femmes et d’enfants força la caserne du Bon-Pasteur, et les troupes ne