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VIE ET ŒUVRE

un coup de couteau et tue l’autre. Le gâteau que tenait celui-ci tombe. Le meurtrier le mange. Tous deux ont péri.

« 15 mai. La prison. Le directeur de la prison vit sur sa terre. On prépare un convoi. Ils sont rasés, dans les fers. Vorobieski, le mari d’une femme débauchée, un vieux de soixante-sept ans : « pour incendie. » Un malade, presque moribond. Un petit garçon boiteux. Cent quatorze personnes pour n’avoir pas de passeports. Il y en a qui sont en prison depuis trois mois. Certains sont très corrompus. D’autres simples, charmants. Un vieillard très faible sorti récemment de l’hôpital ; un pou énorme sur la joue. Ceux qui sont déportés par leur commune. Deux ne sont accusés de rien ; on les déporte : l’un sur la plainte de sa femme. Un petit a été dans une maison d’aliénés, borgne et épileptique. Devant moi il a été pris d’un accès. Un grand soldat. Il est en prison depuis quatre ans. Un an de prison préventive ; on le condamne à un an et demi. On lui a ajouté un an et trois mois, parce qu’il s’est dit artisan. La commune a refusé de le recevoir et depuis, voilà deux ans, il attend le convoi. Deux forçats pour rixe et meurtre : « Nous périssons pour rien. » Ils pleurent. Un bon visage. La puanteur épouvantable.

« 21 mai. Discussion : Tania, Serge, Ivan. Le bien est une chose conditionnelle, autrement dit, le bien n’existe pas. Il n’y a que les instincts.

« 22 mai. Continuation de la discussion ; Le bien dont je parle c’est ce que tu considères tel pour toi et pour tous.

« 24 mai. I. I. Ritchagov, sous-officier de marine,