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LÉON TOLSTOÏ

paroles I Voilà qui serait un baume à ton âme tourmentée[1]. »

Le carnet de Tolstoï, de cette époque, est rempli de notes brèves sur les visiteurs de Iasnaïa Poliana, ainsi que sur les pèlerins rencontrés dans ses promenades, les paysans du voisinage, et les amis qui venaient le voir. Ces notes alternent avec des pensées personnelles, des opinions sur des articles de journaux, etc. En voici des extraits :

« 5 mai. Hier, une conversation avec V. I. sur la vie à Samara. La famille c’est la chair. Abandonner la famille, c’est la deuxième tentation : se tuer soi-même. La famille, c’est un seul corps. Mais ne cède pas à la troisième tentation, au nom de la famille, mais à Dieu seul. L’indicateur de la place que doit occuper l’homme dans l’échelle sociale. Pour un estomac faible, il faut une nourriture légère, de même une famille gâtée exige plus que celle qui est habituée aux privations. »

« 6 mai. Le vieux de Roudakovo, les yeux souriants, la bouche édentée, charmant. Nous avons parlé de la richesse. Le proverbe a raison : « L’argent c’est l’enfer. » Le Saint Sauveur enseignait ses disciples : « Marchez sur la route, vous rencontrerez la croix. N’allez pas à gauche, là-bas c’est l’enfer. » « Allons voir ce que c’est. » Ils y vont. Un amas d’or. « Voilà, il a dit l’enfer, et nous avons trouvé un trésor. » Ils partent chercher un chariot. Ils se séparent et pensent : « Il faudra partager. » L’un aiguise son couteau ; l’autre prépare un gâteau empoisonné. Ils se rencontrent. L’un donne

  1. Archives de T. A. Kouzminsky.