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ressentit une vive douleur de la mort de sa mère; il avait toujours eu pour elle beaucoup d’affection et de respect. Il fit prendre le deuil à sa maison ainsi qi’à ses ministres et à ses ambassadeurs; il interdit, pendant plusieurs mois, dans les villes des Pays-Bas, les fêtes et les divertissements publics : il aurait voulu que la célébration des obsèques de la reine dans la capitale et dans les provinces suivît de près la nouvelle, qui s’y était répandue; de son décès : pour des raisons particulières que nous avons exposées ailleurs, elles eurent lieu à Bruxelles seulement le 15 et le 16 septembre. L’empereur n’y assista point; la faiblesse physique à laquelle il était réduit ne lui aurait pas permis d’en supporter les fatigues; il y fut représenté par le roi d’Angleterre, son fils[1].

Les pourparlers de paix n’avaient pas empêché que Charles-Quint et Henri II ne se préparassent à une nouvelle campagne. Celle-ci s’ouvrit dans les Pays-Bas au mois de mars : elle ne fut marquée par aucun événement d’une importance capitale; l’état d’épuisement où étaient les parties belligérantes ne leur permettai pas de mettre sur pied des armées capables d’exécuter de grandes choses. Charles-Quint, persuadé que le roi chercherait, comme l’année précédente, à se rendre maître du cours de la Meuse, résolut de bonne heure d’y mettre obstacle en faisant construire un fort sur cette rivière; une montagne, dans la terre d’Agimont, qui dominait la rive gauche de la Meuse, lui parut le lieu le plus convenable au but qu’il voulait atteindre. La nouvelle forteresse fut appelée Charlemont, du nom de l’empereur. De leur côté, les Français s’attachèrent à ravitailler Marienbourg, et ils y réussirent; mais, le 15 juillet à Gimnée, et le 16 à Givet, le duc de Nevers et le maréchal de Saint-André furent battus par le prince d’Orange, Guillaume de Nassau, qui commandait les troupes impériales, et dans l’Artois, un corps d’infanterie et de cavalerie française, détaché pour piller les environs de Lillers et le bourg de Saint-Venant, fut mis en une déroute complète par le gouverneur de Bapaume, qui en fit prisonnier le chef avec plus de cinq cents nobles de l’arrière-ban[2].Sur mer, le 15 août, il y eut un combat qui honora la marine belge. Vingt-deux hourques flamandes venaient d’Espagne avec de riches cargaisons; elles furent attaquées près de Douvres par dix-neuf vaisseaux de guerre et six brigantins sortis de Dieppe. Les Flamands étaient de beaucoup inférieurs aux Français en équipages et en artillerie, et ceux-ci avaient un autre avantage : les hourques ne pouvaient lutter de vitesse avec leurs navires; aussi n’eurent-ils pas de peine à les investir et à les accrocher. Après une énergique défense, voyant qu’il leur était impossible de résister davantage, les Flamands mirent le feu à leurs poudres, pour se faire sauter avec leurs ennemis. L’incendie fut effroyable. Dans la confusion qui en résulta, cinq des vingt-deux hourques parvinrent à s’échapper et à gagner le port de Douvres. Cinq autres furent conduites à Dieppe; le reste avait péri. Dans cette affaire les Français eurent six de leurs vaisseaux brûlés et un septième coulé bas; ils perdirent leur amiral et plusieurs de leurs capitaines, avec un nombre considérable de matelots et de soldats[3]. En Italie, Brissac, qui commandait en Piémont pour le roi, s’empara de Casal de Montferrat. Le duc d’Albe, nommé vice-roi de Naples et de Milan, arriva dans cette dernière ville le 13 juin; il avait les pouvoirs les plus étendus; une somme de six cents mille ducats avait été mise à sa disposition; l’empereur et le roi Philippe se promettaient de lui des merveilles. Il fut loin de répondre à leur attente. Tout l’avantage de la campagne fut pour les Français, qui le contraignirent de lever le siége de Santia, réduisirent à capituler Vulpiano, et ajoutèrent encore Montecalvo à leurs conquêtes[4].

  1. Jeanne la Folle et saint François de Borja : Les derniers moments de Jeanne la Folle, dans les Bulletins de l’Académie royale de Belgique, 2e série, t. XXIX, pp. 290 et 389.
  2. Al. Henne, t. X, p. 188-215.
  3. Sandoval, liv. XXXI. §. XXVIII. — Sismondi, t. XII, p. 281. — Al. Henne, t. X. pp. 213-215.
  4. Sandoval, liv. XXXI. — Sismondi, t. XII, pp. 275-277.