Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/466

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans les Pays-Bas, L’érection d’un fort qui servît en même temps à défendre le bailliage de Hesdin, le comté de Saint-Pol et les frontières de l’Artois, avait été jugée nécessaire dans les conseils de l’empereur; l’emplacement choisi pour le construire fut le confluent du Blangis et de la Canche, assez près du lieu où la ville de Hesdin avait existé. Le duc de Savoie en fit commencer les travaux le 8 septembre; ils furent poussés avec tant d’activité que, dès le commencement de novembre, le nouveau fort était en état de défense[1]; Hesdinfert fut le nom qu’on lui donna, par adjonction à celui de la ville qu’il remplaçait de la devise de la maison de Savoie[2]. Emmanuel-Philibert, après avoir renforcé les garnisons des places frontières, licencia le reste de l’armée; il revint à Bruxelles le 29 novembre.

Par le traité de Passau Charles-Quint s’était engagé à assembler la diète de l’Empire dans les six mois : il la convoqua, pour le 15 août 1553, à Ulm d’abord, puis à Augsbourg[3]. Cette convocation, prorogée une première fois au 1er octobre et une deuxième fois au dimanche après Quasimodo de l’année suivante, resta sans effet, à cause des troubles dont la Germanie était le théâtre, de la répugnance qu’éprouvaient plusieurs des princes allemands à comparaître à une assemblée où ils se figuraient que l’affaire de la succession à la dignité impériale pour le prince d’Espagne serait remise sur le tapis, enfin des raisons majeures qui ne permettaient pas au roi des Romains de s’éloigner des pays soumis à son sceptre[4]. Charles, convaincu que, sans une réunion des états de l’Empire, la tranquillité ne pourrait se rétablir en Allemagne, écrivit, en des termes pressants, à son frère, le 10 juin 1554, pour le déterminer à se rendre, aussitôt que possible, à Augsbourg, et à solliciter les princes de la Germanie, comme il le faisait lui-même, de s’y trouver en personne. Jusque-là il avait donné à entendre à Ferdinand que, si sa santé le lui permettait, il irait lui-même présider à la diète[5]; cette fois son langage fut, tout différent : il déclara formellement à son frère qu’il ne voulait pas y assister[6], et il lui en découvrit le motif : « Pour vous dire la cause sincèrement et comme il convient entre frères, et vous priant non la vouloir imaginer autre, — ainsi s’exprima-t-il — c’est seulement pour le respect du point de la religion, auquel j’ai les scrupules que je vous ai si particulièrement et pleinement déclarés de bouche, et même à notre dernière entrevue à Villach, ne faisant doute que, de votre part, comme si bon et chrétien prince que vous êtes, vous regarderez de non y consentir chose qui puisse grever votre conscience, ou être cause de plus grand discord en la religion, ou que le remède d’icelle, que devons espérer de la grâce et miséricorde de Dieu, s’éloigne davantage. » Il donna à Ferdinand tout pouvoir de décider, avec la participation des états, les affaires qui se proposeraient à la diète; il instruisit de cette délégation les princes de la Germanie, qui purent s’assurer par-là qu’il ne serait plus question de faire passer la couronne impériale sur la tête du prince Philippe[7]; en même temps, il prescrivit l’exécution du ban que la chambre impériale de Spire avait, l’hiver

  1. Al. Henne, t. X, pp. 154-157.
  2. Les historiens ne sont pas d’accord sur la signification des quatre lettres fert dont est formée cette devise.
  3. Lanz, t. III, p. 577.
  4. Ibid., pp. 588, 607, 631.
  5. Ibid., pp. 588, 607.
  6. Dans un rapport adressé au cardinal Caraffa par l’évêque Dolfino sur le traité de Passau, la diète d’Augsbourg de 1555 et celle de Ratisbonne de 1556, on lit : « Depuis la rébellion du duc Maurice de Saxe contre l’empereur Charles-Quint, Sa Majesté Impériale demeura si mal satisfaite des hommes, des façons d’agir et des trames de la Germanie, qu’elle ne pouvait plus voir d’Allemands ni entendre parler d’affaires de l’Empire » (Dopo la rebellione la qual fece il duca Mauritio, di casa Sassonia, alla Maestà dell’ imperatore Carlo Quinto, restà quella Maestà cosi mal sodisfalla de gl’ huomini, andamenti et trame della Germania, che non poteva più veder’ huomini tedeschi, ne odir negotio alcuno dell’ Imperio). Et Dolfino dit que cela lui fut assuré par le roi Philippe II lorsqu’il prit congé de ce monarque le 1er octobre 1556.
        Le rapport que nous citons est dans le manuscrit CCXXXII de la Bibliothèque Magliabecchiana, à Florence, fol. 316-329.
  7. Lanz, t. III, pp. 622-624.