Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/449

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mayence, à l’électeur palatin, au duc Maurice, au grand maître de l’ordre Teutonique, au duc de Wurtemberg, au landgrave de Hesse, au duc Jean-Frédéric de Saxe, de protéger les évêques contre les entreprises du marquis de Brandebourg. Albert n’en envahit pas moins les deux évêchés et le territoire de la ville de Nuremberg, sur lesquels il porta le fer et le feu; il s’empara de Bamberg, déclara la guerre à la noblesse de Franconie, prit Schweinfurt, ville impériale, et plusieurs autres places. De nouvelles conférences s’ouvrirent à Francfort, à l’intervention des électeurs palatins et de Mayence, des envoyés des ducs de Bavière et de Wurtemberg et de trois ambassadeurs impériaux; elles furent infructueuses comme les précédentes. Albert, après avoir levé de fortes contributions sur les places qu’il avait conquises, passa en Saxe, d’où il alla se jeter sur les terres du duc Henri de Brunswick[1]. L’opinion commune dans la Germanie était que l’empereur favorisait sous main les entreprises d’Albert, pour affaiblir l’Allemagne et l’obliger à se jeter dans ses bras[2]; on était persuadé qu’autrement il aurait déclaré ennemi public et mis au ban de l’Empire le margrave de Brandebourg. Cette opinion était injuste, Charles-Quint, ayant à soutenir seul le poids de la guerre avec la France, ne voulait pas augmenter le nombre de ses ennemis : il se rappelait comme il avait été abandonné par tous les États de la Germanie l’année précédente; il pouvait appréhender que, s’il mettait le marquis Albert au ban impérial, on ne lui en laissât à lui seul l’exécution : mais ce qui l’avait arrêté surtout, c’était la crainte qu’Albert, se voyant menacé par lui, ne s’alliât de nouveau avec le duc Maurice et qu’ils ne vinssent ensemble assaillir les Pays-Bas; il avait des avis certains que l’électeur de Saxe avait renoué ses liaisons avec le roi de France[3]. Cependant le duc Henri de Brunswick s’était uni, contre le marquis Albert, avec le duc Maurice, les évêques de Bamberg et de Wurzbourg, et le roi des Romains était entré dans cette confédération. Maurice, fait généralissime de la ligue, marcha contre Albert. Les deux armées, qui étaient fortes chacune de vingt-quatre mille hommes environ, se rencontrèrent à Sieverhausen, dans le duché de Lunebourg, à huit lieues de Gottingue. Le 9 juillet la bataille s’engagea entre elles avec le plus grand acharnement. Albert fut mis en déroute; son camp, son bagage, son artillerie, tombèrent au pouvoir du vainqueur avec un grand nombre de drapeaux et d’étendards. Mais Maurice paya cher cette victoire; blessé mortellement pendant l’action, il expira deux jours après[4]. À cette nouvelle, le duc Jean-Frédéric, feignant d’ignorer que l’investiture de 1548 comprît le duc Auguste, frère de l’électeur défunt, envoya à Bruxelles son second fils, le prince Jean-Guillaume, pour supplier l’empereur de le réintégrer dans l’électorat de Saxe. Charles accueillit le jeune prince avec distinction : mais il lui fit voir qu’il n’y avait pas à revenir sur ce qui avait été décidé[5]; et ce fut aussi la réponse de Granvelle au cardinal d’Imola, lorsque ce prélat lui exprima le désir du pape que l’électorat de Saxe fût donné à quelqu’un qui pût être approuvé de Dieu et

  1. De Thou, liv. XII. — Schmidt, t. VII, pp. 414-424.
  2. Nous en avons la preuve dans une dépêche qu’adressaient à l’empereur, de Zeitz, le 1er août 1553, Charles de Tisnacq et Lazarus de Swendy, auxquels il avait donné une mission en Allemagne : « Sire, » — lui écrivent ces envoyés — « il nous a semblé que ne pouvions et ne debvions omettre de donner advertissement à V. M., par cestes, de l’opinion que chacun a conceue d’icelle, en ce pays et toute Allemaingne, à l’endroit des emprinses du marquis Albert, prengnant un chascun le pied comme si le tout se faisoit de vostre consentement ou adveu, et ce pour ruyner l’Allemaingne et establir pour vous la monarchie........ Et quoy que ayons remonstré pour persuader ung chascun au contraire, soubstenir la vérité et élider (détruire) ladicte sinistre opinion, si trouvons ung chascun tellement embeu d’icelle et la chose tellement enrachinée que ne véons moyen de facilement l’abolir. Et ne leur peult sambler que V. M eust si longuement dissimulé au regard desdictes emprinses du marquis, si elle n’eust advoué ce qui s’est faict par luy....... » (Archives du royaume.)
  3. Voir, dans Lanz, t. III, p. 584, sa lettre du 26 août 1553 à Ferdinand.
  4. De Thou, liv. XII. — Robertson, t. II, p. 367.
  5. Lettre de Charies à Ferdinand du 26 août, déjà citée.