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France, le croyant incapable de rien tenter de sérieux, ne s’occupait que de festins, de bals, de tournois, pour le mariage de Diane, fille naturelle de Henri II, avec Horace Farnèse, ses troupes parurent tout à coup devant Thérouanne qu’elles investirent (30 avril) : c’était une des plus fortes places du royaume du côté des Pays-Bas, François Ier avait coutume de dire qu’elle était un des deux oreillers sur lesquels les rois de France pouvaient dormir en paix. Les opérations du siége furent conduites par Pontus de Lalaing, seigneur de Bugnicourt, l’un des plus vaillants hommes de guerre que comptât l’armée belge. Les Français avaient réussi à introduire des secours dans la place; François de Montmorency, fils du connétable, et d’Essé de Montalembert, qui s’était distingué dans les guerres d’Ecosse, étaient à la tête des assiégés. Un premier assaut donné sans succès, le 12 juin, par Lalaing, lui coûta beaucoup de monde; les assiégés aussi firent des pertes considérables, parmi lesquelles celle de d’Essé leur fut surtout sensible. Le 18 Lalaing, ayant renouvelé l’attaque, emporta tous les ouvrages extérieurs : deux jours après Montmorency offrit de capituler. Tandis qu’on parlementait, les soldats impériaux montèrent d’eux-mêmes à l’assaut et se répandirent dans la ville, massacrant tout ce qui se présentait devant eux. Les Belges ne firent de quartier à personne : les Artésiens et les Flamands avaient une haine particulière pour les habitants de Thérouanne, à cause des brigandages que ceux-ci exerçaient fréquemment contre eux. Les Espagnols reçurent à rançon François de Montmorency avec un petit nombre de gentilshommes. La ville fut pillée, livrée aux flammes et bientôt après entièrement démolie; les états de Flandre votèrent un subside pour sa démolition[1].

Au moment où se rallumaient les fureurs de la guerre, Jules III, qui déjà l’année précedente avait fait des tentatives dans le but de réconcilier l’empereur et le roi de France, leur envoya des légats chargés de leur représenter le besoin que les peuples de la chrétienté avaient de la paix, et de leur offrir sa médiation, s’ils voulaient y entendre : il avait choisi, pour aller vers Henri II, le cardinal de Saint-Georges, Jérôme de Capiteferreo, et Hieronymo Dandino, cardinal d’Imola, pour négocier avec Charles-Quint. Dandino arriva à Bruxelles le 15 mai. L’empereur avait été souffrant pendant tout l’hiver; il l’était encore et ne recevait personne : la reine Marie elle-même et ses principaux ministres avaient beaucoup de peine à le voir à d’assez longs intervalles[2]; ce fut seulement le 9 juin qu’il put donner audience au légat. Dandino le trouva dans une petite chambre, assis sur une chaise très-basse, les jambes supportées par un tabouret de la même hauteur à peu près que la chaise[3]. Invité à s’asseoir auprès de lui, il lui exposa l’objet de sa mission. Il savait, par des lettres du cardinal de saint-Georges, les dispositions de Henri II ainsi que du connétable de Montmorency; il en donna connaissance à l’empereur. La cour de France assurait qu’elle était animée des intentions les plus pacifiques; mais elle ne se montrait prête à restituer aucune des places qu’elle avait conquises depuis le commencement de la guerre, à moins qu’il ne fut fait droit à ses anciennes prétentions sur le duché de Milan, le royaume de Naples, la suzeraineté de la Flandre et de l’Artois; elle entendait aussi rester en possession de Metz et de Toul[4]. Charles répondit au légat, en rendant grâces au souverain pontife de la sollicitude qu’il témoignait pour le bien de la chrétienté, qu’il se voyait manifestement que le roi Henri suivait les vestiges de son père, puisqu’il voulait remettre en

  1. Sismondi, t. XII, p. 217. — Alex. Henne, t. X, pp. 22-46.
  2. « ..... S. M. stà tanta fiaccha che non le basta l’animo d’abbocarsi con persona, nè si contenta d’esser vista in quello stato : ..... che la regina medesina, sorella di S. M., e li suoi ministri tutti, havevano che far’ assai a poterle non solo dire una parole in una settimana, ma nè pure vederla..... » (Dépêche du cardinal d’Imola au pape du 28 mai 1553 : Arch. du Vatican, Nunziatura di Fiandra, vol. Ier, fol. 33.)
  3. « ..... Trovai S. M. in una cameretta....., et la trovai in una sedietta assai bassa con un scabeletto sotto i piedi poco manco alto della sedia ovè sedeva..... » (Dépêche du cardinal au pape, du 10 juin, ibid., fol. 57.)
  4. Dépêche du cardinal de Saint-Georges au cardinal del Monte, du 25 mai, ibid., fol. 242.