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l’investiture du duché de Bavière à Albert, fils du duc Guillaume Ier, mort le 6 mars précédent; la cérémonie se fit dans sa chambre, sans apparat[1].

Avant que la reine Marie vînt à Augsbourg, le prince d’Espagne était fort mal vu des électeurs, des princes de l’Empire et des autres membres de la diète : on avait été scandalisé de ce que, rendant visite à l’archevêque de Mayence, il s’était de lui-même place à la droite de l’électeur et était resté couvert tandis que celui-ci tenait son bonnet à la main[2]; sa taciturnité, jointe à sa hauteur, lui aliénait tout le monde. Marie s’appliqua à lui faire comprendre l’intérêt qu’il avait à se concilier les sympathies des Allemands; elle le mit en rapport plus intime avec les électeurs. Dès lors il dîna quelquefois chez eux; d’autres fois il les invita à sa table. Il leur adressait la parole en latin, ne connaissant pas la langue allemande et ne parlant pas le français, quoiqu’il le comprît[3]. Il n’avait point passé jusque-là pour très-adroit dans les exercices du corps; un succès qu’il obtint le réhabilita dans l’opinion publique : le 19 octobre, un tournoi fut donné en l’honneur de la duchesse douairière de Lorraine, sa cousine; ce fut lui qui eut le prix pour avoir le mieux rompu les lances[4].

Depuis la réponse faite par la diète, le 18 août, à l’empereur, plusieurs écrits avaient été échangés entre lui et les états. Sur la question du concile l’entente s’était établie tout d’abord. Il n’en était pas de même en ce qui concernait l’intérim. Charles aurait souhaité que les états lui proposassent des mesures pour lever les obstacles que rencontrait, dans une partie de l’Allemagne, l’exécution de ce qui était prescrit par ce formulaire; les états y répugnaient. Voyant qu’il ne parviendrait pas à triompher de leur répugnance, Charles déclara qu’il prenait sur lui, « pour autant qu’elle appartenait à son office impérial, » la charge de remédier aux infractions faites à son ordonnance[5]. La diète, comme on l’a vu, était d’avis de recourir d’abord, pour la réduction des villes de Magdebourg et de Brème, aux voies de conciliation et d’accommodement. Charles ne s’y montra pas contraire, quoiqu’il se crût autorisé, par l’obstination de ces deux villes, de la première surtout, à user envers elles de moyens de rigueur[6]. Les états écrivirent à l’une et à l’autre afin qu’elles envoyassent des députés pour rendre compte à la diète des raisons de leur conduite[7]. Magdebourg s’en excusa. Brème déféra à l’invitation des états; mais ses députés furent loin de faire entendre le langage de la soumission[8]. L’empereur alors demanda à la diète de voter les subsides nécessaires pour la réduction des rebelles par la force. Quant aux points relatifs à la chambre impériale, à la restitution des biens dont les ecclésiastiques avaient été dépouillés, aux règlements des monnaies, aux surcharges dans les contributions contre lesquelles réclamaient plusieurs membres de l’Empire, et à d’autres objets de moindre importance, comme Charles était animé d’intentions conciliantes, il se mit sans peine d’accord avec les états. Mais il y eut une prétention qu’ils formèrent et sur laquelle il ne put pas leur céder. Aux termes de la transaction conclue, en 1548, entre l’Allemagne et les Pays-Bas, ces provinces devaient être à tout

  1. Dépêche de Morosini et Badoer du 30 septembre. (Reg. cité, fol. 42.) — Journal de Vandenesse.
  2. Dépéche de Badoer et Morosini du 22 juiilet 1550. (Reg. cité, fol. 11.)
  3. Dépêche de Badoer et Morosini du 30 septembre. (Reg. cité, fol. 42.) — Lettre de Granvelle à la reine Marie du 13 octobre. (Arch. du royaume.) — Lettre de Marillac à Henri II du 21 octobre. (Ms. cité, fol. 117 v°.) — Dans sa lettre du 13 octobre, Granvelle écrit à la reine que, pour habituer le prince à parler le français, l’empereur, en sa présence, a ordonné aux Belges et aux Bourguignons attachés à la cour d’user toujours avec lui de cette langue.
  4. Lettre de Badoer et Morosini du 24 octobre. (Reg. cité, fol. 57) — Journal de Vandenesse.
  5. Réponse aux états du 12 novembre.
  6. Écrit de l’empereur du 2 septembre.
  7. Écrit des états du 17 octobre.
  8. Dépêches de Morosini et Badoer des 30 octobre et 11 novembre. (Reg. cité, fol. 58 et 62.)