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ses telles qu’on fut sur le point d’envoyer un courrier au prince pour le faire revenir[1]. Il en souffrit jusqu’au commencement du mois d’octobre. Le 4 novembre il assembla les états généraux ; Philippe et la reine régente, de retour de leur visite aux provinces septentrionales, étaient à ses côtés. Après avoir rappelé les deux propositions qu’il avait soumises, quelques mois auparavant, à chacun des corps d’états en particulier et que tous avaient sanctionnées, il remercia cordialement les représentants de la nation de l’accueil que lui et son fils avaient reçu dans toutes les provinces où ils étaient allés, et de celui qu’elles avaient fait aux reines douairières de France et de Hongrie. Il annonça que l’œuvre de la pacification de l’Allemagne, si heureusement commencée les années précédentes, l’obligeait à retourner en ce pays ; que la reine Marie, cédant à sa prière, voulait bien ne pas insister pour le moment sur la demande, qu’elle lui faisait depuis plusieurs années, d’être déchargée du gouvernement des Pavs-Bas. Il ne négligea point la recommandation, qu’il avait l’habitude de leur faire, de vivre en bonne concorde pendant son absence ; il y ajouta celle de soutenir la vraie et ancienne religion catholique, en repoussant toutes les nouvelles opinions erronées[2]. Le même jour il promulgua la pragmatique sanction à laquelle les états avaient donné leur assentiment[3]. Le 5 novembre il appela les députés des différentes provinces a part, et les entretint de la nécessité d’équiper un certain nombre de navires de guerre pour la garde et la défense du littoral des Pays-Bas, leur proposant d’en couvrir la dépense au moyen d’un impôt à établir sur l’importation des vins[4].

Une grande nouvelle, celle de la mort du pape[5], lui parvint quelques jours après. Il n’avait pas à regretter le pontife défunt : dans les dernières années de sa vie, Paul III s’était montré l’adversaire déclaré de sa politique en Italie et en Allemagne ; il avait tout fait pour susciter contre lui les Vénitiens et le roi de France. L’élection d’un nouveau pape fut longue ; le conclave était divisé en plusieurs partis. Charles penchait pour le cardinal Polus[6]. Ce fut le cardinal Giovanni Maria del Monte qui l’emporta, grâce surtout aux suffrages des cardinaux français qui, par ordre de Henri II, étaient tous accourus à Rome[7]. Del Monte avait été précepteur du neveu de Paul III ; il avait été fait cardinal par celui-ci ; il avait eu à se plaindre de l’empereur, qui lui avait refusé l’évêché de Pavie ; dans le consistoire et hors du consistoire on l’avait entendu plus d’une fois s’exprimer d’une manière défavorable à ce monarque ; il avait eu la confiance particulière du pape qui venait de mourir ; il avait été son légat au concile de Trente ; il était un de ceux qui avaient le plus contribué à la translation et au maintien de ce concile à Bologne. Tout cela avait persuadé la cour de France que, si le cardinal del Monte était élevé au siège pontifical, il continuerait la politique de son prédécesseur[8].

Aussi la surprise et le mécontentement y furent extrêmes[9], lorsqu’on sut qu’aussitôt après son élection, Jules III (c’était le nom qu’avait pris le nouveau pontife) avait envoyé don Pedro de Tolède à l’empereur, pour l’assurer de ses sentiments d’amitié, lui témoigner le désir que leurs relations fussent fondées sur une confiance mutuelle, et lui faire l’offre de rétablir le concile à Trente,

  1. Lettres de Marillac au roi, des 29 septembre et 6 octobre (Manuscrit cité, pp. 151 et 158)
  2. Alex. Henne, t. VIII, p 385.
  3. Placards de Brabant, t. IV, p. 429. — Afin d’entourer cet important statut de plus de solennité encore, Charles en réclama la confirmation de son frère Ferdinand comme roi des Romains. Ferdinand la donna par des lettres datées du 14 décembre 1550, à Augsbourg, lesquelles sont insérées aussi aux Placards de Brabant, t. IV, p. 431.
  4. Archives du royaume : registre des propositions faites aux états généraux de 1535 à 1563, fol. 274.
  5. Paul III était mort le 10 novembre.
  6. Ses sentiments à cet égard sont exprimés dans une lettre qu’il écrivit à Simon Renard, son ambassadeur en France, le 15 février 1550. (Manuscrits de Wynants.)
  7. Correspondance de l’ambassadeur Renard avec l’empereur. (Ibid)
  8. Lettre de Simon Renard à l’empereur, du 21 février 1550. (Manuscrits de Wynants.)
  9. Lettre du même du 28 mars.