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plusieurs tentatives avaient été faites, et ce fut non moins infructueusement qu’on les renouvela, pour le persuader d’accepter l’intérim. Il n’en était pas de même du second, qui, dans des requêtes pleines d’humilité, promettait de se ranger à la volonté de l’empereur touchant la religion, si l’on voulait le rendre à la liberté[1].

Après s’être livré au plaisir de la chasse, pendant plusieurs jours, dans les bois de Tervueren et de Groenendael, Charles fit, le 22 septembre, son entrée à Bruxelles. Des réjouissances publiques, des processions, des illuminations célébrèrent le retour du souverain qui revenait comblé de gloire et plus puissant qu’il n’avait jamais été. Le 26 octobre Charles réunit, dans son palais, les états généraux des Pays-Bas. Il avait à leur demander des subsides et la ratification de la transaction conclue avec les états de l’Empire à Augsbourg : il les remercia, par l’organe de Philippe Nigri, chancelier de la Toison d’or, du concours qu’ils avaient prêté à la reine régente durant son absence ; il leur montra le grand avantage que ses sujets des Pays-Bas trouveraient dans la confédération qui leur garantissait la protection de l’Empire envers et contre tous ceux qui voudraient les attaquer ; il leur dit que, désirant leur manifester encore plus l’amour qu’il leur portait et le cas qu’il faisait de leur fidélité et de leur dévouement, il avait mandé le prince son fils, afin qu’il les visitât, prît connaissance du pays et partageât l’inclination qu’il avait pour eux ; il leur annonça aussi le mariage de la princesse Marie, sa fille, avec l’archiduc Maximilien. Le pensionnaire de Bruxelles remercia l’empereur au nom de l’assemblée. Tous les états donnèrent leur assentiment à la convention d’Augsbourg. Tous accordèrent aussi les subsides qui leur furent demandés.

La santé de Charles était en ce moment assez satisfaisante : « Tout homme, » — écrivait, le 5 octobre, à Henri II Charles de Marillac, son ambassadeur à la cour impériale — « tout homme qui le voit maintenant, ne l’ayant auparavant vu, peut aisément juger qu’il porte visage et contenance de ne la faire longue ; mais ceux qui l’ont vu, l’an passé, en Auguste, s’aperçoivent qu’il se porte encore moins mal qu’il ne faisait en Allemagne, et mêmement à Spire et à Cologne, où il avait un piteux et pauvre visage, lequel maintenant il semble avoir amende de beaucoup depuis qu’il est ici[2]. » À la fin de ce mois la goutte le prit et, pendant plusieurs jours, le fit cruellement souffrir aux bras, aux mains et aux épaules[3]. Le 16 novembre il se mit à la diète, son remède ordinaire ; mais il fut contraint de la laisser, s’en trouvant trop affaibli et plus mal que les autres fois[4]. Les médecins durent recourir à d’autres moyens, lesquels ne restèrent pas sans effet : il put, au commencement de décembre, assister à la messe[5]. Il attendait la visite de la reine douairière de France ; il se réjouit d’être en état de recevoir sa meilleure sœur[6].

Éléonore n’avait pas été heureuse avec François Ier ; depuis la mort de son époux, sa situation était devenue plus triste encore : Henri II avait peu d’égards pour elle ; à l’exemple du souverain, la cour ne lui témoignait qu’une médiocre déférence[7] ; aussi désirait-elle vive-

  1. Lettre de Marillac à Henri II, du 28 septembre 1548. (Manuscrit cité, p. 12.)— « Advis de la court de l’empereur », joint à une lettre de Marillac au connélable du 3 février 1549. (Ibid., p. 144.)
       MM. Henne et Wauters (Histoire de Bruxelles, t. Ier, p. 367), rapportent que l’empereur « fit partir, le 20 septembre, le prince saxon pour Pamele ». Ce fait ne peut pas être exact, Marillac, dans sa lettre du 28 septembre, disant positivement que « le duc de Saxe est encore à Bruxelles ». On peut supposer même qu’il n’avait pas quitté cette capitale à la date du 3 février 1549, d’après la manière dont le même ambassadeur parle delui dans l’ « Advis de la court de l’empereur ».
  2. Manuscrit cité, p. 16.
  3. Lettre de Marillac au roi du 6 novembre (manuscrit cité, p 60). « Il a toujours gardé le lit avec une telle impatience — écrivait Marillac — pour le grant doleur qu’il en sentoit, qu’on ne l’avoit encores veu au passé si affligé et tourmenté. »
  4. Lettre de Marillac au roi du 25 novembre. (Manuscrit cité, p. 82.)
  5. Lettre de Marillac au roi du 6 décembre. (Manuscrit cité.)
  6. Charles-Quint, lorsqu’il écrivait à la reine Marie, l’appelait « Madame ma bonne sœur » ; il disait • Madame ma meilleure sœur » à Elèonore, qui était leur aînée à tous deux.
  7. Il y a, aux Archives impériales, à Vienne, une longue lettre d’Éléonore à la reine Marie sur les désagréments de sa position en France. Elle est datée du 9 mai 1548.