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nand pour roi des Romains : des négociations s’ouvrirent entre leurs ministres, à l’intervention de Granvelle, à la suite desquelles Jean-Frédéric se désista de son opposition; moyennant cela, l’empereur ratifia son contrat de mariage avec Sybille, sœur du duc de Clèves, en vertu duquel, si le duc décédait sans hoirs mâles, les enfants qui naîtraient de Jean-Frédéric et de Sybille lui succéderaient. On reçut à Spire, vers la fin d’avril, la nouvelle de la défaite des troupes impériales sous le commandement du marquis del Vasto, à Cerisolles[1]; les électeurs, la plupart des princes de l’Empire, les ambassadeurs, allèrent exprimer à l’empereur le déplaisir qu’ils en éprouvaient : « Ce qui me peine seulement, répondit Charles-Quint, ce sont les pauvres gens qui sont morts pour mon service[2]. » Le 5 mai eut lieu une imposante solennité : Charles, revêtu de ses habits impériaux et entouré des électeurs aussi en costume de cérémonie, des archiducs et des autres princes, donna, à la maison de la ville, à Wolfgang Schuzbar l’investiture de la grande maîtrise de l’ordre Teutonique. Une autre cérémonie, qui fut suivie, pendant plusieurs jours, de fêtes brillantes[3], occupa bientôt après la cour impériale : ce fut le mariage du comte Lamoral d’Egmont avec la princesse Sabine de Bavière[4]. Le 23 mai Charles, écoutant plus les intérêts de ses sujets des Pays-Bas que ceux de sa famille, signa, avec le roi de Danemark Christiern III, un traité de paix héréditaire et perpétuelle[5].

Autant il avait été aisé de réunir les suffrages de la diète sur la guerre contre la France, autant il fut difficile de mettre d’accord les protestants et les catholiques au sujet de la paix publique de l’Allemagne et de l’organisation de la chambre impériale. Comme le remarque l’ambassadeur vénitien Bernardo Navagero, la position de Charles-Quint, en présence des prétentions opposées des deux partis, était embarrassante : car si, d’un côté, il était plein de zèle pour la religion catholique, de l’autre le besoin qu’il avait des protestants le forçait de les ménager[6]. A la suite de conférences qu’il avait eues avec l’électeur de Saxe et le landgrave de Hesse, il s’était décidé à appuyer auprès des états les demandes des protestants : à peine eut-il été donné lecture à la diète de l’écrit qui les contenait, que les catholiques abandonnèrent la salle des séances, disant que de telles propositions étaient contraires à la fois à la religion, à l’autorité du saint-siége et à celle même de l’empereur. Les deux nonces qui suivaient la cour impériale et celle du roi des Romains firent de très-fortes remontrances à l’un et à l’autre monarque. Charles et Ferdinand leur répondirent qu’ils ne manqueraient pas à leur devoir de maintenir la religion, qu’ils vivraient toujours catholiquement, mais qu’il fallait chercher les moyens de mettre un terme aux dissensions de l’Allemagne et pourvoir aux plus pressants besoins de la chrétienté. Un des principaux griefs des catholiques était la déclaration de Ratisbonne; non-seulement ils s’opposaient à ce que le recez la sanctionnât, mais ils en demandaient l’annulation : Charles leur dit qu’il tenait en son esprit cette déclaration pour nulle, car il avait été trompé lorsqu’il l’avait donnée, et que, quand on examinerait si elle devait ou non conserver sa force, il promettait, en parole d’empereur, de l’annuler, mais que, pour le moment et dans l’état où étaient les choses, il serait inopportun d’en parler; il les assura qu’il continuerait d’être le prince religieux et catholique qu’il avait été jusque-là; que, s’il faisait maintenant quelque chose contre leur gré, c’était parce qu’il ne pouvait faire autrement[7]. Enfin, et après bien des pourparlers de Gravelle avec les hommes influents des deux partis, le recez put être arrêté et publié le 10 juin. Il portait que les états accordaient, pour

  1. Le 14 avril.
  2. Trois années de l’histoire de Charles-Quint, p. 36.
  3. Les 8, 9, 10 et 11 mai.
  4. Trois années de l’histoire de Charles-Quint, pp. 35, 36.
  5. Dumont, Corps diplomatique, t. IV, part. II, p. 274.
  6. Trois années de l’histoire de Charles-Quint,p. 32.
  7. Trois années de l’histoire de Charles-Quint, pp. 37-41.