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cesses n’admirent personne à leurs conférences; elles discutèrent et résolurent elles-mêmes les différents points qui étaient restés en débat. Enfin, le 31 juillet, elles tombèrent d’accord : la paix ne fut toutefois signée que le 3 août; la publication s’en fit le sur lendemain, en grand appareil, à la cathédrale. La veille, le roi d’Angleterre y avait donné son accession, après avoir tenté vainement d’empêcher qu’elle ne se conclût[1]. Les stipulations en étaient telles que Charles-Quint pouvait le désirer. Le traité de Madrid était confirmées tous ses articles, excepté ceux qui concernaient le duché de Bourgogne, les comtés d’Auxerrois, de Maçonnais, etc., sur lesquels duché et comté il était dit que l’empereur conserverait les droits et actions qu’il y avait auparavant, pour les poursuivre par voie amiable ou de justice. La rançon des princes français était fixée à deux millions d’écus d’or. Le roi s’obligeait à rappeler les troupes qu’il avait en Italie, à remettre à l’empereur les places qu’il occuperait, au moment de la ratification de la paix, dans le duché de Milan, le comté d’Asti et le royaume de Naples, à ne prendre part, en Italie ni en Allemagne, à aucune pratique au préjudice de l’empereur. Non-seulement il abandonnait tous ses alliés d’Italie, mais encore il prenait l’engagement de requérir les Vénitiens de délivrer aux autorités impériales, dans les six semaines, les villes, châteaux et forts du royaume de Naples qui seraient en leur pouvoir, et, au cas qu’ils s’y refusassent, de se déclarer leur ennemi et d’aider l’empereur à les y contraindre par un subside mensuel de 30,000 écus; il s’engageait de même à intervenir auprès de la république de Florence pour que, dans les quatre mois, elle s’arrangeât avec l’empereur. De son côté, l’empereur lui faisait quelques concessions; mais elles étaient insignifiantes. Aussi n’y a-t-il pas lieu de s’étonner qu’un historien de grand renom trouve le traité de Cambrai « bien plus déshonorant pour la France que celui de Madrid, qu’il était destiné à modifier[2]. »

Tandis que la gouvernante des Pays-Bas et la régente de France débattaient les conditions de la paix qu’on a nommée, d’après elles la paix des Dames, Charles-Quint pressait l’achèvement des préparatifs de son passage en Italie. Il avait compté partir à la fin de juin; ce fut seulement dans les derniers jours de juillet que la flotte, les troupes, l’artillerie, les munitions dont il devait être accompagné, purent être rassemblées dans le port de Barcelone. Il emmenait avec lui huit mille hommes d’infanterie environ et un certain nombre de gens de cheval : pour payer tout ce monde, il venait d’engager au roi de Portugal, moyennant 350,000 ducats, les épiceries des Moluques. Avant de quitter Tolède, il avait fait son testament, écrit en quadruple original; deux étaient en castillan, deux en latin; il envoya l’un des derniers à l’archiduchesse Marguerite, pour être gardé par elle : « C’est un ouvrage nécessaire, — lui écrivit-il — et je l’ai volontiers fait par temps pour le bien des miens et de mes pays et sujets, et au surplus, m’en remets au bon plaisir du Créateur[3]. » Le 27 juillet il monta sur la galère commandée par Andrea Doria qu’il avait appelé d’Italie. Sa suite était nombreuse et brillante; la fleur de la noblesse castillane avait brigué l’honneur d’en faire partie. Elle comprenait aussi ses principaux ministres : le grand chancelier, les seigneurs de la Chaulx et de Granvelle, le secrétaire d’État Francisco de los Covos, le grand commandeur don Garcia de Padilla. Notons ici un détail qui ne nous paraît pas indigne de figurer dans cette notice. Il était de mode en Espagne de porter la chevelure très-longue. Quelques jours avant de s’embarquer, Charles fit

  1. Il avait fait faire des démarches à Paris par le duc de Suffolk et le grand trésorier d’Angleterre; afin que madame d’Angoulême ne se rendit pas à Cambrai. (Lettre de Marguerite à Charles-Quint du 30 juin 1529.)
  2. Sismondi, Histoire des Français, part. VII, chap. V.
  3. Lettre du 23 septembre 1529. Marguerite, ayant reçu le testament, lui avait écrit, le 2 septembre : « J’espère que Dieu vous donnera si longue vie que en ferés encoires une douzaine d’autres, et, quand le cas adviendra, seray desjà bien pourrie en terre, et aurés fait accomplir et exécuter le mien. »