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maîtres sculpteurs, et, dès lors, il ne dut plus se mettre à la solde d’autrui. Son talent ne tarda pas à être apprécié, et, sa grande facilité aidant, il put suffire à de nombreuses commandes. Nous devons forcément suivre, d’après Guillet de Saint-Georges, l’ordre chronologique des travaux du maître, car ses travaux sont l’histoire de sa vie.

Il fit donc trois grandes figures de pierre pour la cour du séminaire de Saint-Sulpice, au faubourg Saint-Germain : la Vierge et l’enfant, Saint Joseph et Saint Jean l’Évangéliste, chacune placée dans une niche. Pour l’église des Quinze-Vingts, un groupe, Saint Roch et un ange, destiné à l’autel de la Vierge. Une Vierge et l’enfant, groupe en marbre de sept pieds de haut, pour l’église de Saint-Eustache.

Nous arrivons ici à l’époque décisive de la vie de Buyster : le comble fut mis à son succès par son association avec Sarrazin, le sculpteur du Louvre. Notre artiste travailla sur les dessins du directeur des travaux, travailla au grand pavillon, au-dessus de la porte principale, et y exécuta, pour la façade du côté de la cour, deux groupes de cariatides, ceux de droite, de quatorze pieds de hauteur, et la Renommée du même côté, au-dessus du fronton; plusieurs lions et des têtes de femme dans les tympans des croisées et des trophées à côté des croisées de l’attique; dans la frise, des enfants et des enroulements de festons; des têtes de satyres sur les clefs des arcades des croisées; enfin plusieurs chapitaux de colonnes corinthiennes et composites. Au grand Pavillon des Tuileries, faisant face au jardin, on voit de lui, au-dessus du fronton de l’attique, deux Renommées, les ornements du fronton et six grandes figures représentant des vertus morales.

Du moment où le roi employait le ciseau de Buyster, celui-ci devait être recherché par les plus grands seigneurs de la cour et par d’autres personnages de haut rang, parmi lesquels il faut citer le président Desmaisons, M. Bordier, fermier général, le surintendant des finances, De Bullion, etc. C’est pour ce dernier qu’il exécuta un de ses ouvrages les mieux réussis, un groupe fait d’un seul morceau de marbre dans lequel il sculpta une chèvre et deux enfants. C’était une œuvre étudiée avec soin, bien finie et appartenant à un genre dans lequel Buyster excella. En effet, parmi ses productions, ce sont les enfants, les génies, les amours qu’on doit le plus admirer. Buyster fut employé par le roi, non seulement au Louvre mais aussi à Versailles. Près de la fontaine d’Apollon, quatre grandes figures de pierre, exécutées en 1665, deux satyres et deux hamadryades; dans la cour, un Neptune avec un cheval marin; sur le péristyle, du côté de la grotte, Cérès et Bacchus, et près de la pyramide d’eau, un Faune, qui fut son dernier ouvrage pour le public. Mais à côté de ces travaux officiels, Buyster en achevait un grand nombre pour des couvents ou des églises. Les religieuses du Calvaire, les Carmélites lui firent des commandes; on voyait de ses travaux dans l’église du Sépulcre[1], à Saint-Nicolas des Champs, aux sœurs de la Visitation, aux religieuses Bernardines, à l’hôtel de Nevers, au Val-de-Grâce, fondé par Anne d’Autriche. Pour ce dernier monastère, c’est la reine-mère elle-même qui choisit Buyster pour y exécuter divers travaux importants, tout comme mademoiselle de Montpensier le fit pour les religieuses de la Visitation. Buyster exécuta plusieurs mausolées, entre autres à Bourges, puis le tombeau du président le Bailleul, à Soissy, enfin, son chef-d’œuvre, à l’église de Sainte-Geneviève du Mont, le magnifique mausolée du Cardinal de la Rochefoucauld, grand aumônier de France. Ce monument en marbre noir, porte la statue du cardinal, en marbre blanc, à genoux et revêtu d’un manteau à longue queue que soutient le génie de la douleur. Nous n’avons fait qu’une nomenclature rapide des principales œuvres de notre statuaire; nous en passons nécessairement beaucoup. On comprend que, malgré la longue carrière de Buyster, il ne put accomplir seul de semblables travaux; il avait de nombreux élèves dans son atelier et plusieurs bons sculpteurs français travaillèrent sur

  1. Ceux-ci exécutés sur ses dessins par M. le Vendre.