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forte de soixante-quinze mille hommes, venait de franchir la Sambre (12 juin), sous la conduite du général Jourdan et s’était campée près de Fleurus ; elle fut attaquée dans ces positions par l’armée autrichienne (16 juin), qui remporta une victoire complète après une lutte acharnée, qui se prolongea jusqu’à cinq heures du soir. Le général De Beaulieu commandait la première colonne d’attaque, qui d’abord s’empara de Velaine et des hauteurs de Chapelle-Sainte-Barbe, puis décida le sort de la journée, par l’effort héroïque qu’il fit contre Lambusart et Campinaire, après sa réunion avec la colonne du feld-maréchal Werneck. Malheureusement les alliés ne surent pas profiter de cette victoire ; les Français passèrent de nouveau la Sambre, le 18, et vinrent bombarder Charleroi pour la quatrième fois. La garnison refusa, jusqu’au 25, toutes les offres de capitulation ; à cette date, se trouvant hors d’état de prolonger la résistance, elle dut se rendre, mais obtint toutefois les honneurs de la guerre comme un hommage accordé à sa bravoure. Le lendemain de cette capitulation, des secours désormais inutiles lui arrivaient ; les deux armées ennemies se trouvèrent alors en présence et le 26, à la pointe du jour, s’engagea la deuxième bataille de Fleurus. Dans ce combat, le général De Beaulieu qui commandait la gauche des impériaux, après s’être assuré des passages de la Sambre, attaque les républicains avec vigueur, enfonce la division du général Marceau, s’empare de Velaine, expulse l’ennemi du bois de Copeaux, enlève Lambusart, puis s’arrête devant un ordre de battre en retraite que lui envoie le généralissime prince de Cobourg.

D’après le témoignage de Jomini, la bataille de Fleurus, qui décida du sort de la Belgique, aurait été gagnée par les alliées si la valeur et l’habileté que déployèrent les généraux De Baillet et De Beaulieu avaient été secondées par l’action combinée des autres colonnes. Malheureusement, le prince de Cobourg était encore sous l’influence de vieilles routines de guerre et ne se doutait pas que l’art consiste à attaquer un point du front ennemi avec la plus grande partie de ses forces ; il avait, selon l’usage suivi servilement par les généraux allemands de cette époque, multiplié les colonnes et les attaques sans établir entre elles de liaison ; la plupart de ces colonnes étaient même déjà en retraite au moment où le général De Beaulieu obtenait à la gauche des succès qui devaient rester stériles. C’est très-probablement aux fautes qui furent commises dans cette journée par l’état-major autrichien, qu’il faut rattacher la disgrâce dans laquelle tomba le général De Beaulieu, à qui le prince de Cobourg retira son commandement. Toutefois, l’empereur d’Autriche lui conféra la grand’croix de l’ordre de Marie-Thérèse et lui confia les fonctions de quartier-maître général de l’armée, dès que le général Clerfayt en prit le commandement en remplacement du prince de Cobourg. Mais ces fonctions, qui correspondent à celles de chef d’état-major général d’aujourd’hui, convenaient peu à l’esprit indépendant et dominateur du général De Beaulieu ; il ne les conserva que jusqu’au commencement de l’année suivante (1795).

Les victoires que les Français avaient remportées en Italie, dans la campagne précédente, engagèrent le gouvernement impérial à opposer à l’illustre chef des troupes républicaines, le général, qui par ses talents et ses antécédents semblait être le digne adversaire du jeune héros républicain. De Beaulieu reçut donc, avec le grade de feld-zeugmester (général d’artillerie), le commandement en chef de l’armée autrichienne en Italie (1796). Mais au lieu de lui donner, comme on le lui avait promis, des forces suffisantes pour chasser l’ennemi du territoire piémontais, on se borna à lui envoyer des renforts insignifiants. Quel que fût le mérite du général De Beaulieu, qui comptait alors plus de soixante et onze ans d’âge, c’était se faire singulièrement illusion que de croire qu’il pût vaincre, avec l’armée combinée dont la majeure partie était peu docile à ses ordres, le jeune et glorieux héros qui allait se placer, par ses victoires, au rang des plus illustres capitaines. Les événements devaient démontrer bientôt toute