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furent ses débuts à Florence. C’était en retournant vers sa patrie qu’il s’arrêta dans cette ville: il ne devait plus la quitter que pour quelques excursions momentanées. Bologne était pauvre, sans amis, sans ressources; c’était à pied sans doute qu’il comptait regagner la Flandre. La Providence lui envoya un de ces hommes généreux, un de ces Mécènes dont l’intelligence savait deviner le génie, dont la fortune était consacrée à le soutenir et à l’encourager. Bernardo Vecchietti, gentilhomme florentin, vit ses études et ses essais et comprit ce qu’il serait un jour. Il le logea, lui fit continuer ses études d’après ses grands prédécesseurs, et, pendant plusieurs années, il fut son protecteur et son ami. La reconnaissance de Bologne se traduisit par les dessins magnifiques sur lesquels fut construit le palais Vecchietti, un des monuments de son génie. C’est à cette époque de sa jeunesse que notre artiste produisit une Vénus nommée admirable par Vasari et qui, montrée au prince François, fils aîné du duc régnant, Cosme de Médicis, valut à l’auteur la protection du jeune prince. Le Samson combattant les Philistins vint ensuite et fut exécuté pour le Casino du prince François; plus tard ce groupe qui surmontait une fontaine fut offert par le grand-duc Ferdinand, successeur de son frère François, au duc de Lerme, premier ministre du roi d’Espagne. Ici vient se placer le Neptune de Bologne, puis le beau Mercure ne reposant que sur un pied, et que l’on voit au Musée de l’Uffizi, à Florence. Cette statue est connue dans le monde entier, grâce à une innombrable quantité de reproductions. Le groupe de Florence victorieuse, commandé par le grand-duc François, donc vers 1575, orne le vieux palais; il fait pendant à une Victoire de Michel-Ange. Une de ses meilleures statues est celle de saint Luc, en bronze et décorant l’église d’Or San Michele. En 1580, il fut appelé à Gênes et non à Genève comme Immerzeel l’imprime par erreur, pour y décorer une chapelle édifiée par Luc Grimaldi, dans l’église de Saint-François, en l’honneur de la Sainte-Croix. Il se fit accompagner dans ce voyage par son compatriote et élève Pierre Francheville ou Franqueville, nommé en Italie Pietro Francavilla. Celui-ci exécuta pour cette chapelle et d’après les modèles de son maître, six statues représentant la Foi, l’Espérance, la Miséricorde, la Justice, la Force et la Tempérance. Jean Bologne y fit huit bas-reliefs, représentant des scènes de la Passion. Un beau Christ domine toute la composition. Plusieurs statues du maître ornent le jardin Boboli. Viennent ensuite la statue en marbre de Cosme Ier et enfin l’Enlèvement des Sabines. Ce groupe colossal mit le comble à sa réputation. Un jeune homme enlève une belle jeune fille des bras d’un vieillard qu’il foule aux pieds. Le modèle du jeune homme était un gentilhomme florentin, Leonardo Ginori, qui avait deux mètres trente centimètres de hauteur. Le superbe bas-relief de bronze ornant le piédestal, et qui représente l’Enlèvement des Sabines, est une œuvre digne de tous éloges. Le dessin, d’une puissance et d’une pureté admirables, le moelleux de l’exécution, l’expression sentie des deux principales figures, le désespoir de l’une, la force et la volonté de l’autre, excitèrent une admiration universelle et firent oublier facilement quelques légers défauts dans la figure agenouillée. Le groupe fut placé à la Loggia, le peuple florentin éclata en transports, les commandes et les élèves affluèrent; le Grand-Duc nomma Bologne son sculpteur, et, des poésies consacrées à la louange du dernier chef-d’œuvre, on forma un volume. Inspiré encore par cet éclatant triomphe, Bologne entreprit à la villa royale de Pratolino, qui venait d’être construite par Buontalenti pour François de Médicis, son ouvrage le plus colossal. Au centre des délicieux jardins de Pratolino, se déta- chant au milieu d’un groupe de sapins sombres, on voit une statue gigantesque dominant la nature qui l’environne; devant elle est une pièce d’eau semi-circulaire, et, servant de piédestal, un groupe de rochers. C’est le fameux Jupiter pluvius nommé vulgairement l’Apennin. Le Dieu est accroupi; de sa main