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plois ; la Belgique, alors placée sous la domination autrichienne, venait de s’en affranchir par la révolution brabançonne, qui ne fut, on le sait, qu’une rapide transition à de nouvelles destinées, celles que nous imposèrent, d’abord, la République et, plus tard, l’Empire français. Beyts avait cependant eu le temps de révéler sa supériorité comme fonctionnaire et les suffrages de ses concitoyens l’appelèrent, sous le nouveau régime, à prendre place dans le conseil des Cinq-Cents, comme représentant du département de la Lys. Il se fit également apprécier dans cette assemblée par son esprit d’initiative, par la rectitude de son jugement. Il y combattit le projet d’exclure les ci-devant nobles des fonctions publiques[1], plaida habilement la cause des rentiers de l’État que l’on voulait dépouiller, proposa de former une garde départementale pour le Corps législatif, de mettre les grenadiers à la disposition du Directoire et, enfin, il accusa avec véhémence le ministre de la police, Duval, d’avoir ordonné l’arrestation arbitraire d’un grand nombre de citoyens. L’ensemble de ses actes prouve que s’il était l’adversaire déclaré de tous les excès et de toutes les exagérations des partis, il voulait néanmoins le maintien du pouvoir établi. Sous ce rapport, sa conduite fut mieux caractérisée et plus énergique encore, lors de la fameuse journée du 18 brumaire an viii (9 novembre 1799). S’il faut en croire les affirmations de quelques-uns de ses amis, il se serait, en voyant l’assemblée envahie, élancé à la tribune et aurait, le premier, demandé la mise hors de la loi du dictateur. Quoi qu’il en soit de l’authenticité de ce fait, omis par les historiens de la Révolution, mais affirmé par la Biographie universelle, toujours est-il que Beyts fut hostile à l’établissement du Consulat ; les mesures prises contre lui en fournissent l’irrécusable preuve : il fut considéré comme suspect, surveillé et éloigné à quarante lieues de Paris. Cependant il entrait, dès lors, dans les vues du futur empereur de rallier autour de lui, autant que possible, tous les hommes d’action et d’intelligence et Beyts allait être l’un des agents les plus actifs de l’administration impériale. Il fut d’abord préfet du département de Loir-et-Cher ; puis commissaire du gouvernement près de la cour d’appel de Bruxelles, emploi qui, après le nouvelle organisation judiciaire, se transforma en celui de procureur général impérial ; en 1804, il devint inspecteur général des écoles de droit, spécialement de celles de Bruxelles, de Strasbourg et de Pologne ; vers la fin de l’année 1810 on le nomma procureur général près la cour de la Haye, et enfin, au mois d’avril 1811, il remplit les fonctions de premier président de la cour impériale de Bruxelles. Ce rapide passage dans des emplois aussi importants montre la variété de ses aptitudes, l’étendue de ses connaissances, l’activité de son esprit ; d’autres faveurs, d’un ordre moins élevé, constatent aussi l’estime qu’il inspirait à un maître tout-puissant : la croix de chevalier de la Légion d’honneur (1804), plus tard, les fonctions de chancelier de la troisième cohorte de cet ordre et enfin l’anoblissement avec le titre de baron.

Chargé de présider, à Hambourg, un tribunal spécial, Beyts s’y trouva renferme lors du fameux siége soutenu par le maréchal Davoust et n’en sortit qu’en 1814, à la chute de l’Empire français. Tout lui parut bien changé à son retour ! Le nouveau gouvernement des Pays-Bas l’avait remplacé dans ses fonctions et il semblait, eu égard à son âge, à ses antécédents, à ses goûts mêmes, que sa carrière politique était à tout jamais terminée. Le sort en avait cependant décidé autrement. Quinze ans plus tard, Beyts, devenu sexagénaire, retrouva toute l’ardeur, toute la passion de sa jeunesse, et l’on vit le vieux parlementaire, qui avait pris part aux luttes de la République et de l’Empire, s’associer résolûment aux dangers d’une révolution nouvelle : la Belgique venait de rompre, avec violence, le lien qui l’unissait depuis 1815 à la Hollande. Une existence nouvelle com-

  1. Sur ce point il existe pourtant des assertions contradictoires : ainsi la Biographie des contemporains, publiée en 1821, affirme que Beyts proposa, au contraire, l’exclusion des anciens nobles de toute fonction publique.