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les basses terres de ce pays. Une célébrité qui a échappé pendant tant de siècles à l’oubli ne saurait être considérée comme apocryphe. Un vitrail de l’église de Biervliet nous a, du reste, conservé le souvenir de Beuckels. Il y est représenté en costume de pilote pêcheur, assis sur un panier et tenant un hareng qu’il se dispose à évider avec son couteau. Des filets, une rame et un tonnelet forment autour de lui les attributs de sa profession. Cette peinture sur verre semble avoir été exécutée au xviie siècle, pour rappeler les services rendus à l’industrie nationale par Beuckels qui, d’après un acte authentique, occupait déjà, en 1312, les fonctions d’échevin. Il faut donc supposer que ce personnage n’était pas un simple pêcheur, mais un de ces riches commerçants en poisson dont les barques allaient au loin recueillir le hareng pour en faire ensuite le trafic.

La date de sa mort est incertaine. Le vitrail dont nous avons parlé l’indique comme ayant eu lieu en 1397. Cette indication est évidemment fausse puisqu’un acte authentique range Beuckels parmi les échevins de Biervliet, en 1312. Il est plus vraisemblable d’admettre, contrairement à l’opinion de Raepsaet, qu’il mourut en 1347, comme l’ont dit Marchantius, Sanderus et Grammaye, et, par conséquent, il devient impossible que Guillaume Beuckels ait pris du service comme marin à la fin du xive siècle, sous Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, ainsi que l’indique M. Van Bruyssel, dans son Histoire du commerce et de la marine en Belgique, t. II, pp. 30-31. Il n’est pas sans intérêt d’ajouter que le célèbre poëte Cats a consacré une soixantaine de vers à la gloire de Beuckels dans son Tachentig jarig leven.

Bon de Saint-Genois.

Messager des sciences historiques, 1829-1830, p. 411-414, avec pl. — Raepsaet, Notice lue à l’Acadcmie royale de Bruxelles, le 18 novembre 1816. Gand, in-8o. B. Poelman. — Le Mayeur, Gloire Belgique, I, pp. 430-432. Heylin, De Inventis Belgarum. (Mémoire de l’Académie de Bruxelles, année 1786.)

BEUDIN (Corneille) ou GODINEZ[1], missionnaire, né à Gravelines (ancienne Flandre), martyrisé dans la Nouvelle-Biscaye, le 4 juin 1650. Beudin manifesta dès sa jeunesse une piété ardente. A peine avait-il achevé ses humanités à Berghes-Saint-Winoc, qu’il demanda à être admis dans la Compagnie de Jésus, principalement dans l’espoir de remplir des missions lointaines, et qu’il entra dans le noviciat de Malines où il y fut chargé de donner l’instruction élémentaire aux enfants qui se destinaient aux études latines. En 1635, il prononça ses vœux et alla étudier la théologie à Louvain. Il revint peu de temps après à Malines pour y enseigner les humanités et s’y signala surtout par son habileté à diriger la musique de l’église conventuelle. Il obtint enfin la faveur de faire partie d’une mission de quinze religieux que les jésuites envoyaient dans les Indes occidentales. Beudin alla faire ses adieux au collége de Berghes où il avait passé sa première jeunesse, puis s’embarqua à Ostende avec ses compagnons de voyage pour l’Espagne. Il partit de Cadix pour les Indes le 12 juillet 1647. Pendant la traversée, il utilisa son talent de musicien en charmant les ennuis d’une longue navigation par les accords de son violon et de sa belle voix. Après un repos de quelques semaines, son navire reprit la mer, relâcha aux îles Fortunées, doubla le Cap-Vert et parvint dans le port de Vera-Cruz à la fin de septembre. De là les missionnaires se dirigèrent sur Mexico avec l’intention d’y séjourner quelque temps chez les jésuites établis en cette ville. Mais, Beudin impatient de se livrera ses travaux apostoliques, demanda et obtint d’être envoyé dans une partie éloignée du pays pour y aider le père Maes, Flamand comme lui, à catéchiser d’assez nombreux néophytes, nouvellement convertis. Il aspirait cependant à une plus haute destinée : il ambitionnait la couronne du martyr. Cédant à ses instances, ses chefs lui ordonnèrent d’aller prêcher la foi dans une contrée où aucune tentative de ce genre n’avait encore été essayée. Le pays des Taraumares, peuplade cruelle et barbare, aujourd’hui la Nouvelle-Biscaye (Nova-Cantabria), lui fut assigné. Il débuta avec bonheur dans ce poste dangereux, et

  1. Nom d’emprunt qu’il prit dans les Indes.