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cinglait avec nos voyageurs vers Tunis, où ils séjournèrent trois semaines. Ils abordent ensuite à Alexandrie d’Égypte, après une traversée des plus pénibles, arrivent au Caire le 7 août, et après avoir visité le mont Sinai, le 24 du même mois, ils voient enfin cette ville de Jérusalem dont le père et le grand-père d’Anselme avaient consacré le souvenir dans leur ville natale, par la construction d’un monument religieux, comme nous l’avons déjà dit. Ici la relation qu’Adornes nous a laissée de son voyage est remplie de détails sur les lieux saints que tous les pèlerins avaient l’habitude de visiter dans ces occasions. Cette description est sèche et dans le goût de toutes celles de l’époque, qui semblent avoir été écrites d’après un même type : un sentiment profondement religieux en fait seul les frais. On y trouve cependant quelques éclaircissements curieux sur les diverses sectes qui divisaient alors l’Église d’Orient. C’est donc en pèlerins, pleins d’une piété ardente plutôt qu’en qualité de voyageurs curieux, qu’ils visitent Bethléem, Nazareth et tous les lieux consacrés par le souvenir du Sauveur. Après avoir séjourné dix jours à Damas, ils se rendent à Beyrouth, où ils rencontrent un compatriote, le frère Griffon, de Courtrai, religieux franciscain qui était parvenu en peu d’années à ramener à l’Église romaine plusieurs Maronites et entre autres leur patriarche. Ils voient ensuite l’île de Chypre, qui est décrite avec quelque prolixité ; une autre description, celle de l’île de Rhodes, est d’autant plus intéressante qu’elle n’est antérieure que de dix ans à la mémorable défense de Rhodes par le grand maître Pierre d’Aubusson. Les îles de l’Archipel attirent particulièrement leur attention ; ils abordent à la côte du Péloponèse et séjournent quelque temps à Modon, qui était aux Vénitiens. Ils quittent enfin la Grèce et une navigation des plus pénibles les amène dans le port de Brindes, au royaume de Naples. Le 21 décembre 1470, Anselme Adornes arrive à Naples et y séjourne quinze jours. Il est admis à l’audience du roi Ferdinand, auquel il est probable qu’il vint également communiquer l’objet de sa mission ; car cette réception eut un caractère tout officiel. Le 11 janvier suivant, il revient dans la capitale du monde chrétien, après avoir employé huit mois à visiter les côtes barbaresques, l’Égypte, une partie de l’Arabie, la terre sainte et la Grèce. À Rome, il est de nouveau reçu par Paul II, auquel il communique tous les éclaircissements qu’il avait recueillis sur la puissance musulmane pendant ses voyages. Pour le récompenser de son zèle, le pape lui propose de s’attacher son fils Jean, ce qu’Anselme accepte avec reconnaissance. Pendant son séjour à Rome, qui dure dix-huit jours, il s’y occupe surtout de recueillir les inscriptions consacrées aux grands hommes. Il fait enfin ses préparatifs de voyage pour rentrer dans sa patrie, visite Sienne, Florence, Bologne, Ferrare, Padoue et Venise ; traverse le Tyrol, descend le Rhin jusqu’à Cologne et revient à Bruges par Aix-la-Chapelle, Maestricht et Anvers. Nous oublions de mentionner qu’à Mols, dans le Tyrol, il a une rencontre officielle avec Sigismond d’Autriche, qui l’assure de ses bons sentiments pour Charles le Téméraire. C’est le 14 août qu’Adornes revient à Bruges. Bien que l’itinéraire ne relate point ce qui se passa dans les diverses entrevues qu’Adornes eut avec les princes, le pape et les rois, il est facile de soupçonner que, dans ces divers entretiens, il portait un caractère officiel de la part du duc de Bourgogne. Il est probable que le diplomate réservait ces notes secrètes pour les communiquer directement à Charles le Téméraire, qui n’aimait ni les indiscrétions ni les révélations prématurées. Le duc de Bourgogne, pour lui témoigner sa satisfaction, le nomma son conseiller et son chambellan. Bientôt il le chargea d’une nouvelle mission. Marie Stuart, réfugiée à Bruges depuis deux ans, s’était réconciliée avec son frère Jacques III}. Elle résolut donc de retourner en Écosse avec lord Boyd, son époux. Elle quitta Bruges le 4 octobre 1471, accompagnée d’Anselme Adornes, qui devait ménager la première entrevue du frère et de la sœur. Sa femme, Marguerite Vander Bank,