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comte de Bradi, descendant d’une ancienne et noble famille de Sartène. Elle adopta la famille, le pays de son mari, et se croyant Corse, elle agit comme si elle l’eut été. Elle suivit son mari en Italie, fut blessée au siège de Gènes par un éclat de bombe, faillit y mourir de faim, et n’y ressentit que la douleur d’être séparée de sa mère, qui mourut dans ses bras peu de temps après. Devenue mère à son tour, Mme de Bradi se retira dans le château de Rebrechien, près d’Orléans, pour y nourrir et y élever ses trois enfants. Tout ce que l’étude la plus assidue a pu développer en elle de facultés, a été consacré à ses enfants ; cette application à ses devoirs lui valut l’amitié de Mme la comtesse de Genlis, qui se plaisait à la nommer son élève, et lui écrivait : Vous êtes appelée à me seconder et à me succéder en tout. Mais Mme de Bradi qui ne sut jamais comprendre la gloire, et qui ne voyait rien en elle qui l’autorisât à y prétendre, n’aurait point imaginé de faire imprimer ce qu’elle écrivait, si elle n’eut perdu sa fortune. De dame châtelaine elle devint femme auteur, professeur, et se résigna tristement, mais sans humeur, à travailler pour vivre, comme le font tant de gens qui ne s’en enorgueillissent pas du tout. Le monde cependant parut lui en savoir gré ; ses amis lui demeurèrent fidèles, ses écoliers devinrent ses amis, les journalistes dirent du bien de ses ouvrages, et les lecteurs ne les trouvèrent pas ennuyeux.

Son métier d’auteur, pourtant, ne lui prodigua pas d’abord beaucoup d’agrément Par générosité de caractère, ou par esprit de contradiction, elle soutenait toujours ses oppositions ; et quoique sa famille, alliée à celle des Bonaparte, eût été ruinée par une haine particulière de Napoléon ; quoique l’opinion de Mme de Bradi n’eût aucune importance, les Lettres écrites de Corse (1 vol in-8°) firent mettre leur auteur sur deux listes de proscription