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Mme Sandrin s’était imposée, et tel en est le résultat. Sa fille aînée a épousé un médecin distingué par son esprit et ses talents.

En attendant l’époux que le sort lui destinait, la jeune Hermance formait son cœur et son esprit par la rêverie et par le spectacle d’un intérieur où sa mère lui apparaissait chaque jour plus grande, plus noble, plus digne d’être aimée.

L’avenir, qui n’occupe guère les jeunes filles (car elles se reposent sur leurs parents du choix d’un mari), était tout pour sa pensée : elle se sentait valoir trop pour vouloir d’un homme ordinaire, pour se condamner à végéter à l’ombre d’un intérieur bourgeois, souvent troublé par des tourments domestiques dont sa mère était la victime. Elle réfléchissait tristement et grave¬ ment à la destinée des femmes ; tout en s’occupant de la maison, complément d’une éducation maternelle, tout en brodant, sa tête et son âme s’exhalaient en mélodies. Sa consolation, c’était la poésie dont elle faisait son charme, sans penser que jamais ce qu’elle enfantait dans le secret et le silence, ce qu’elle couvait sous l’aile de sa mère, serait un jour jeté au public. Quand elle fit ses premiers vers, elle n’avait encore lu que des livres sérieux, relatifs à une éducation fort compliquée qui s’achevait au sortir du pensionnat et sous les yeux maternels : ses études se partageaient entre la musique, l’anglais, et toutes ces choses utiles qu’apprennent les femmes qui pensent seulement à faire de bonnes et dignes mères de famille, capables de présider elles-mêmes à l’éducation de leurs enfants.

La poésie ne fut pas chez elle une idée suggérée par la lecture de nos maîtres : elle n’en fit pas un apprentissage ; la poésie vint à luire en elle comme un éclair. Quand elle fit ses premiers vers, c’étaient déjà, des piè-