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Et voilà mon histoire ; je me faufile furtivement à travers les illustrations contemporaines, pensant que dans trente ou quarante ans mes cendres seront douce¬ ment remuées, quand mon nom, se mêlant aux leurs, sera lu par nos neveux ; car, en vérité, Ce que j’ai fait pour la gloire, ou, si vous aimez mieux, pour la postérité, est si peu, si peu de chose, que c’est à en rougir que de le rappeler ici. Et j’ai beau chercher dans ma vie privée quelque point notable, quelque action sortant du vul¬ gaire, je ne trouve rien à vous raconter. Si vous me soupçonnez atteinte d’une feinte modestie vous n’avez qu’à prendre la peine dé lire ce .qui suit, et vous vous convaincrez de ma parfaite sincérité.

Jusqu’à douze ou treize ans, je fus comme tpus les enfants, rieuse, étourdie, n’aimant guère l’étude, mais beaucoup la lecture, dédaignant les poupées .et rafolant du jeu à la Madame, secondée que j’étais par une femme de chambre de«na mère, presque aussi jeune, aussi enfant que moi, et nos compositions dialoguées pou¬ vaient passer pour un vrai drame, un roman en je ne sais combien de volumes, chaque jour amenant une nouvelle scène ; nous nous identifiions avec nos person¬ nages, nous les aimions de passion, et ce monde occulte au milieu duquel je vivais me laissait peu de loisir pour la vie véritable ; ce fut avec un calme qui aurait pu faire honneur à la plus grave philosophie, que je vis les événements politiques enlever à mon père une fortune patrimoniale accrue encore dans les affai¬ res. Qu’est-ce que l’argent ? me disais-je. Pourtant dès ce jour il me fallut apprendre que la vie est autre chose que des causeries frivoles, autre chose que des contes des Mille et une Nuits. J’étais l’aînée de sept enfants, et plus de brillant avenir, plus de dot pour aucun.

« Il faut travailler, ma chère petite, » me dit un jour