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LES IDÉES MODERNES SUR LES ENFANTS

vérifications ultérieures ; on les fera sans doute, mais pour le moment, c’est la certitude.

Troisième temps : une période de travail conscient, qui se passe devant la table de travail. On examine de nouveau l’idée qui a apparu subitement, on analyse son contenu, on fait les calculs nécessaires et on écrit le mémoire qui donne l’exposé de la question. Poincaré a insisté longuement sur la nature, l’éclosion de cette idée, et sur les antécédents qui l’ont préparée. Elle suit une période de travail conscient, et probablement elle ne se serait jamais produite si on n’avait pas commencé par méditer volontairement sur le problème. C’est une idée qui a un contenu à la fois vague et plein ; elle est précise, car elle indique la voie à suivre, les calculs à faire, et le but auquel on va arriver ; c’est une véritable idée-mère, comme l’a appelée Beaunis ; mais elle reste vague en ce sens qu’elle ne réalise, par elle-même, aucun calcul ; et Poincaré a bien raison de faire cette remarque si judicieuse et si importante que jamais on ne trouve par l’inconscient le produit d’une multiplication, après que dans une autre période on aura pensé aux deux facteurs.

Ce mode de travail est donc un mode inconscient ; et en effet, il serait facile de l’opposer à la méthode de réflexion ; le travail n’est pas à nos ordres, l’idée n’est pas déterminée par un effort conscient et pénible de recherche ; on ignore l’idée ; quand elle arrive, elle surprend par sa brusquerie, son manque de causalité psychique ; elle paraît l’œuvre d’une activité qui nous est étrangère, qui se développe hors de nous ; nous sommes quant à nous, passifs ; nous laissons faire ; et cette absence d’effort nous est d’autant plus agréable que nous sommes convaincus que cette idée qui ne nous coûte rien va être féconde en résultats.

Mais la description de Poincaré ne s’applique guère qu’à l’éclosion de l’idée ; elle se réfère donc à un cas