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L’INTELLIGENCE

Ajoutons que toutes les fois qu’un instituteur est venu nous voir, après notre examen, pour nous signaler que tel élève en particulier lui paraissait être un sujet d’élite, cet élève s’était tiré à son avantage de notre examen ; il avait une avance d’un an, ou du moins c’était un régulier ; jamais il n’était en retard. Autre détail significatif. Lorsque nous avons eu à examiner des enfants qui étaient soupçonnés d’arriération, et qui l’étaient, non pour des raisons vagues, des motifs futiles, mais parce qu’ils présentaient un retard d’instruction égal au moins à trois ans, sans l’excuse d’une fréquentation scolaire irrégulière, nous leur avons toujours trouvé des retards intellectuels, mis en évidence par notre échelle métrique. Je copie dans mes notes le renseignement suivant, pris sur une fournée de 13 enfants suspects d’arriération qu’on m’a amenés, en 1908, à mon laboratoire de pédagogie. Les retards d’intelligence existent pour tous ; ils sont compris entre 1 an et 5 ans. Voici, du reste, la série de ces retards 1 an — 1 an — 1 an — 2 ans — 2 ans — 2 ans 1/2 — 3 ans — 3 ans — 3 ans 1/2 — 3 ans 1/2 — 4 ans — 5 ans. On peut remarquer, en passant, que ces retards d’intelligence sont énormes, bien supérieurs en moyenne à ceux qu’on rencontre chez des normaux. Je suis d’avis, pour ma part, que tout retard d’intelligence égal à deux ans constitue une présomption extrêmement grave d’arriération.


En quoi consiste au juste la mesure d’intelligence ? Comme pour l’instruction, comme pour le développement corporel, de même pour l’intelligence, le mot mesure n’est pas pris ici au sens mathématique : il n’indique pas le nombre de fois qu’une quantité est contenue dans une autre. L’idée de mesure se ramène pour nous à celle de classement hiérarchique ; de deux enfants est le plus intelligent celui qui réussit le mieux un certain ordre d’épreuves. En outre, par la