Page:Binet - Les Idées modernes sur les enfants.djvu/120

Cette page a été validée par deux contributeurs.
113
L’INTELLIGENCE

compte de ses doigts, ou distingue entre le matin et l’après-midi, ou nomme correctement les couleurs principales, ou sait rendre la monnaie ? C’est absolument impossible. Il est facile de voir, en causant avec un élève, s’il est lent ou vif, bavard ou taciturne, et on acquiert ainsi une certaine notion d’ensemble, qui n’est pas à dédaigner, surtout dans les cas extrêmes, dans les cas qui sont si nets, il faut bien le dire, qu’ils mettent tout le monde d’accord. Mais pour savoir si un enfant a l’intelligence de son âge, ou s’il est en retard, ou en avance, et de combien, il faut posséder une méthode précise et vraiment scientifique.

Cette méthode, la psychologie peut-elle nous la donner ? Si elle ne nous l’a pas donnée jusqu’ici, ce n’est pas de sa faute ; car depuis vingt à trente ans, la question de la mesure de l’intelligence n’a pas cessé d’être à l’ordre du jour. Nombreux sont les faiseurs de programmes, les techniciens en chambre, qui ont imaginé des expériences destinées à faire connaître et à jauger les capacités mentales des gens. Que n’a-t-on pas proposé ? Des rébus à deviner, des lacunes d’un texte à combler, une mauvaise écriture à déchiffrer, une pensée compliquée à comprendre, une machine à démonter ou à remonter, un mécanisme caché à imaginer, un dessin à critiquer, une absurdité à dépister, une série de mots abstraits à expliquer, etc., etc. On a même proposé une fois un test beaucoup plus simple il aurait consisté à faire frapper des coups le plus vite possible sur un coin de table ; et au nombre des coups frappés en cinq secondes, on aurait jugé si l’enfant était intelligent ou non.

Supposons qu’on fasse d’abord le tri entre ces différents tests, dont quelques-uns manquent peut-être de clarté et de précision. Si on gardait le meilleur d’entre eux, et qu’on l’appliquât rigoureusement, avec suite, à toute une série d’écoliers qui seraient d’in-