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L’INTELLIGENCE

mois un effet de ralentissement sur les études de l’écolier transplanté. À plus forte raison en est-il ainsi lorsque le changement a lieu de la campagne à la ville. Dans ce cas, que faut-il faire ? Comment doit-on juger l’enfant qui sait mal ses leçons, répond mal aux questions posées en classe, et surtout paraît ne pas comprendre ce qu’on lui explique ? Une appréciation de son degré d’intelligence peut être fort utile.


Nous avons supposé une transplantation faite entre deux écoles de valeur équivalente. Mais il arrive souvent qu’un enfant sort d’une école où il a reçu une mauvaise instruction, donnée avec une méthode défectueuse. Comme on le dit vulgairement, il a été mal commencé. Si on le fait lire, on s’aperçoit des mauvaises habitudes qu’il a déjà contractées ; il lit en chantant ou en ânonnant, ou bien il a une lecture courante assez nette, mais il estropie régulièrement et sans aucun scrupule tous les mots difficiles qu’il rencontre dans sa lecture, ou bien il n’hésite pas à les passer. Ce qu’on observe pour la lecture se retrouve pour les autres branches d’enseignement, et en particulier pour le calcul. Il y a des écoliers qui font à ravir les quatre opérations, mais sont incapables de les appliquer au moindre problème ; ils font des multiplications dans le cas où des divisions sont nécessaires ; ils trouvent par exemple qu’un marchand a plus de marchandises après la vente qu’avant, et autres résultats fantastiques qu’ils se gardent bien de juger. On leur a appris à calculer, non à raisonner. Chacun connaît des établissements où l’instruction dégénère en routine ; les élèves s’appliquent seulement à la forme ; ils peuvent présenter des cahiers dont la calligraphie et les accolades sont irréprochables, mais le fond des devoirs est plein de non-sens ; tout est en surface. Le maître enrichit leur mémoire, mais ne fait rien pour développer leur juge-