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INTRODUCTION

Les variantes orthographiques, en effet, du moins dans les textes de Claude Binet, n’offrent pas d’intérêt, ni à l’historien de la littérature, ni même au philologue. Ce qui importe dans ces textes, c’est avant tout la pensée de l’auteur, et jusque dans les nuances de l’expression ; ce n’est pas l’orthographe, car elle est relativement fixée en 1586 ; elle n’a pas eu le temps d’évoluer du mois de mars au mois de décembre de cette même année, et je ne vois pas de différence bien sensible à cet égard entre les deux premières éditions et la troisième, postérieure de dix ans, elle dépend enfin le plus souvent de la négligence ou de la fantaisie de l’imprimeur, quand elle s’écarte des habitudes généralement suivies alors. Dans ces conditions, les variantes orthographiques ne peuvent offrir de documents utiles.

En revanche la ponctuation présente un réel intérêt, et Mlle Evers eût été mieux inspirée, à mon avis, si elle avait porté de ce côté l’attention minutieuse qu’elle a accordée à la comparaison des trois premières graphies. Elle n’a pas reproduit les textes avec assez d’exactitude en ce qui concerne la ponctuation, laquelle me semble avoir une grande importance, soit qu’elle modifie tant soit peu le sens, soit qu’elle exprime certaines intentions de l’auteur, que nous n’avons jamais le droit de négliger, soit enfin qu’elle se conforme à l’usage du temps.

Par exemple, il est vrai que les textes de Binet contiennent beaucoup de virgules superflues, entre autres celles qui précèdent le mot et dans les énumérations. Mais ces virgules, qui d’ailleurs ne nuisent pas au sens, étaient d’un usage courant au xvie siècle ; elles avaient sans doute leur raison d’être, ne fût-ce qu’une valeur de diction, aux yeux des gens de l’époque ; cela suffit pour que nous les reproduisions. Même remarque pour la virgule après les mots qui annoncent une appellation ou un titre ; je l’ai conservée quand elle s’est présentée[1], bien que d’autres exemples m’eussent autorisé à la supprimer.

D’autre part, il n’y a pas de point et virgule dans les textes de Binet. Ce signe de ponctuation n’est pas seulement absent de sa prose, il est généralement inconnu au xvie siècle, qui emploie à sa place deux points. J’ai donc cru devoir, là encore, suivre l’usage du xvie siècle : j’ai conservé les deux points là où nous mettrions maintenant un point et virgule, et je n’ai employé en aucun cas le point et virgule.

De même Binet n’emploie jamais les guillemets, ni quand il cite un auteur ni quand il rapporte les paroles de Ronsard ou d’un autre. On n’en trouve dans aucun de ses trois textes. Cela ne lui est pas particulier ; les guillemets n’apparaissent guère au xvie siècle que pour mettre en relief dans les vers une idée générale, sentence ou proverbe. J’ai donc suivi Binet et l’usage de son temps en laissant de côté les guillemets, d’autant plus volontiers que leur absence n’est pas du tout indispensable à l’intelligence du texte.

Les seules corrections que je me sois permises dans la ponctuation, sans avertir le lecteur, sont les suivantes : 1° j’ai rétabli les virgules dans les appositions ; 2° j’ai remplacé la virgule et le point par deux points, devant une citation ou des paroles rapportées. J’y étais autorisé par Binet

  1. Voir par. ex. p. 2, ligne 2 ; p. 23, ligne 10 ; p. 24, ligne 11 ; p. 36, ligne 9.