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exemples un peu exceptionnels ; la règle n’est pas l’incohérence de l’image, mais bien sa concordance avec la pensée.


Images qui succèdent à l’audition d’une phrase.

J’ai fait déjà la remarque que si on demande au sujet de se former une image après avoir entendu un mot, on le place dans des conditions favorables au développement des images ; rien ne prouve que les images jouent un rôle aussi important dans la pensée qui se développe naturellement, sans souci spécial d’introspection, par exemple lorsque nous lisons un ouvrage, ou que nous écoutons une conversation.

Voilà une importante objection contre l’étude expérimentale de l’idéation faite avec des mots.

Pour parer à cette objection, il faudrait faire l’expérience sans que personne sût que c’est une expérience : dire des mots d’un ton naturel, attendre qu’ils soient compris, puis aussitôt après questionner sur les images ; s’il est possible de réunir ces conditions, on sera certain que le sujet n’a pas eu la préoccupation de courir après des images, et qu’il a pris le temps de réaliser le sens de ce qu’on lui disait : c’est là une expérience à double face ; c’est, face au sujet, l’observation d’un phénomène spontané qui se développe avec sa liberté naturelle d’allure ; c’est, face à l’expérimentateur, une expérience qui a le mérite de la précision, et cet autre mérite de répondre à une question importante. Mais on ne peut pas prononcer des mots isolés, comme nous l’avons fait jusqu’ici, sans donner l’éveil aux personnes. J’ai réussi à ne pas les mettre en garde, en leur adressant quelques demandes simples ou des paroles quelconques relativement à des affaires de vie courante et familière ; puis, dès que je