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dans des conditions trop inégales pour qu’on puisse comparer la ténacité de leur mémoire. Ce qui confirme ma réserve, c’est la manière dont sont distribuées les lacunes de mémoire dans le morceau écrit par Marguerite ; elle n’a que 2 mots soufflés dans les 8 premiers vers, juste le même nombre de mots qu’Armande ; et les autres mots soufflés sont dans les 8 vers suivants, qu’Armande n’a pas eu le temps d’apprendre pendant les 10 minutes d’étude que j’avais accordées. Le nombre absolu de mots conservés par Marguerite est donc beaucoup plus grand que le nombre absolu d’Armande.

Vers le mois de mars 1901, j’ai fait pendant une semaine, avec les deux jeunes filles, des essais sur les meilleures méthodes pour retenir par cœur ; j’employais comme terme de comparaison la méthode naturelle ; je constatai encore qu’en un même temps Marguerite apprend un bien plus grand nombre de vers qu’Armande. Je ne cite points de détails, car ce serait trop long, et il s’agit d’une étude d’un caractère tout différent.

Le 10 août 1901, je leur fais apprendre des vers dans leur recueil de morceaux choisis ; le temps d’étude est réduit à 5 minutes. Marguerite apprend 16 vers et Armande seulement 8 ; la première commet 7 erreurs et la seconde seulement 3. Leur mémoire, à en juger par cet échantillon, est devenue plus rapide que l’année précédente, mais la différence reste la même entre les deux sœurs.

Je citerai une dernière expérience, qui se distingue des autres en ce que j’ai obligé les deux sujets à lire et à répéter à haute voix, au lieu de le faire mentalement pendant l’étude du morceau. C’est la méthode préconisée par Miss Steffens[1] ; méthode qui a l’avantage de montrer comment, par quels procédés une personne apprend par cœur. Le temps accordé a été de 6′ 45. Marguerite a appris

  1. Voir l’article de Larguier, déjà cité.