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chose que l’œil, par exemple les poils, le nez, la langue. » En résumé, il n’y a que l’élément dont on a besoin qui devient saillant dans l’image, ou, si l’on préfère cette autre manière de parler, l’image ne contient que quelques éléments nets, et ce sont les seuls qui fixent l’attention. Conséquemment, les portions marginales de l’image sont vagues.

Le contour extérieur de l’image, ce qui la limite, ne peut pas être défini comme forme. C’est Armande qui m’en fait spontanément la remarque ; on ne peut pas dire — ce sont ses expressions, — si le tableau mental est rond ou carré.


Défaut de précision de l’image.

L’image, en général, est imprécise, et nous verrons tout à l’heure pour quelle raison nous ne nous en apercevons pas. Cette qualité de l’imprécision varie beaucoup, évidemment, suivant les cas. Certaines images seraient, quoiqu’on ait soutenu le contraire, dessinables.

Ainsi, Marguerite, priée de penser à sa sœur, se représente son nom ; elle voit le nom écrit, elle voit que c’est écrit en caractères cursifs, un peu droit, elle peut reproduire l’A, elle le trace et se trouve contente de son dessin, qui représente un A majuscule un peu spécial ; elle hésite seulement sur un point, elle ne sait pas si la barre transversale de l’A dépassait de peu ou beaucoup les deux lignes montante et descendante. Si cette image est assez précise, il en est d’autres dont l’indétermination est poussée à un degré extrême, ce que montre du reste la description qu’on nous en fait. Je dis à Marguerite caravane. Elle répond : « Il y a toujours quelque chose d’indistinct avant. Je vois une rangée ; c’est mon imagination, ça ne peut pas s’appliquer à quelque chose que j’ai vu. Puis, j’ai vu distinctement après un tableau du Louvre, représentant une caravane avec des chameaux, et ce que j’ai mieux vu c’est