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demander dans quelle mesure le développement de l’intelligence peut se concilier avec le développement des forces physiques.

Bien que nous soyons loin de pouvoir traiter à l’heure actuelle tous les points de ce vaste programme, il nous a paru bon de l’esquisser, à titre de suggestion pour des investigations nouvelles.

Influence du travail intellectuel sur l’activité automatique du système neuro-musculaire. — Les documents concernant cette question sont très peu nombreux. On s’est borné jusqu’ici à observer quelques-uns des effets produits par un travail intellectuel court, une lecture, un calcul mental, ou aussi une idée fixe. De ces études incomplètes est sortie la conclusion que tout effort d’esprit agit sur les muscles, que tout phénomène psychologique produit un état moteur particulier, auquel participe l’organisme entier. Sur ce thème on a joué un nombre infini de variations. Il faut rattacher à cet ordre d’idées une théorie nouvelle de l’attention, qui a été surtout exposée en France par Th. Ribot : la nature motrice de l’attention. Cet auteur soutient que l’attention, non seulement agit sur des muscles, ceux de la respiration, par exemple, ou du sourcil, mais encore qu’elle est un mécanisme moteur, qu’elle consiste dans une coordination de muscles. On est bien étonné de lire des affirmations aussi absolues ; et on cherche en vain sur quelles preuves elles s’appuient.

Malgré ce manque de preuves précises, la théorie de Th. Ribot a été acceptée, en France du moins, par un grand nombre de pédagogues et de médecins ; on voit citer cette théorie comme une théorie démontrée, basée sur des faits précis. Nous ne nous arrêterons pas sur des discussions de théorie, notre but est de rapporter les faits acquis qui doivent être admis par tout le monde, quelle que soit la théorie que l’on partage, et ce n’est qu’après avoir décrit ces faits d’observation précise que l’on devrait chercher à