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très délicats qui ne peuvent être mesurés que par des signes objectifs. L’état de fatigue de l’expérimentateur, sa distraction et d’autres causes qui lui sont personnelles, doivent, en modifiant sa propre sensibilité, changer les indications qu’il attribue à l’appareil. De plus, quand l’artère change de calibre, se rétrécit par exemple sous l’influence de la vaso-constriction, l’aire de la pulsation reçue par le doigt de l’expérimentateur diminue, et il en résulte un changement dans la sensation tactile qu’il reçoit : on ignore comment l’expérimentateur peut interpréter un changement de ce genre.

On a cherché à mesurer la pression dans les capillaires de l’homme en employant le procédé de la décoloration. On applique, par exemple, sur la peau, soit la peau du lobule de l’oreille, une lame de verre sur laquelle on exerce une compression croissante jusqu’à ce que les capillaires commencent à pâlir ; la pression produisant cet effet est considérée comme égale à la pression du sang dans les capillaires. C’est à J. v. Kries[1] qu’on doit les premières recherches dans ce sens. Bloch vient de les reprendre. On a trouvé que la pression dans les capillaires des doigts varie de 24 à 62 millimètres de mercure, suivant que la main est élevée ou pendante. La critique générale à faire à ce procédé est la même que nous avons formulée précédemment : la mesure de la pression repose sur une appréciation subjective. Lorsqu’on étudie des phénomènes aussi délicats que ceux de la pression et surtout ceux des changements de pression dans les artères et les capillaires, il faut recourir à un appareil qui exprime lui-même ces résultats, et qui les exprime soit par un chiffre, soit par un tracé. C’est là l’avantage du sphygmomanomètre de Mosso[2], appareil nouveau, qui est comme le perfectionnement d’un ancien appareil de Marey. Il est formé de tubes métalliques dans lesquels on introduit les doigts, comme

  1. Arbeiten aus der physiologischen Anstalt zu Leipzig. 1875, p. 69.
  2. Arch. ital. de Biologie, p. 177, 1895.