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Tel est, en résumé, le cas du paysan Victor. La nouvelle de cette guérison s’étant rapidement répandue, on vit accourir de tous côtés une foule de malades qui venaient demander le soulagement de leurs maux. Le phénomène recommença, à la grande joie de Puységur, qui écrit : « La tête me tourne de plaisir en voyant le bien que je fais. » Ne pouvant suffire au nombre toujours croissant des malades, le marquis magnétisa, selon les procédés de Mesmer, un orme situé sur la place du village de Buzancy. Les malades assis autour de cet arbre, sur des bancs de pierre, enlaçaient avec des cordes qui partaient de l’arbre les parties souffrantes de leur corps et formaient la chaîne en se tenant par les pouces. Pendant ce temps, M. de Puységur choisissait entre ses malades plusieurs sujets que, par attouchement de ses mains ou présentation d’une baguette en fer, il faisait tomber en crise parfaite, qui, bientôt, dégénère en un sommeil où toutes les facultés physiques paraissent suspendues, mais au profit des facultés intellectuelles.

Un témoin oculaire, Cloquet[1], nous donne, à cet égard, des renseignements précieux. On a les yeux fermés, dit-il ; le sens de l’ouïe est nul, il se réveille seulement à la voix du maître. Il faut bien se garder de toucher le malade en état de crise, même la chaise sur laquelle il est assis, car on lui causerait des angoisses, des convulsions, que le maître seul peut calmer. Le maître les désenchante en leur touchant les yeux ou en leur disant : Allez embrasser l’arbre. Alors ils se lèvent, toujours endormis, vont droit à l’arbre et, bientôt après, leurs yeux s’ouvrent. Une fois rendus à l’état normal, ces malades ne gardent aucun souvenir de ce qui s’est passé pendant les trois ou quatre heures de leur crise.

Mais ce que Puységur recherchait avant tout, c’était la guérison des maladies ; la thérapeutique était son objectif, comme il avait été celui de Mesmer. Il observa ou crut observer que les malades en état de crise avaient un pouvoir surnaturel, qui leur mérita le nom de médecins ; en effet, il leur suffisait de toucher, par dessus le vêtement, un malade qui leur était présenté, pour sentir la partie affectée, le viscère souffrant et pour indiquer à peu près les remèdes convenables. Préoccupés uniquement de cette ques-

  1. Détail des cures opérées à Buzancy, près Soissons, par le magnétisme animal, in-8, 44 p., Soissons, 1784.