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un homme d’honneur

tu pouvais seulement me faire comprendre tout ce que tu sais ! Que se passe-t-il dans ces mondes que nous ignorons ? Devons-nous un jour les connaître ? D’où venons-nous ? Qu’est-ce donc que notre existence ? Le passage de la vie à la mort doit-il assimiler l’essence intellectuelle de notre être, à l’oxygène concentré en vapeurs nuageuses qui nous entoure ? cette substance étherée, que l’on nomme âme, qui nous fait sentir, souffrir, mouvoir, agir, s’en retourne-t-elle dans les soupirs de l’air pour s’infiltrer de nouveau dans une enveloppe supérieure et par une dernière évolution arriver à la béatitude éternelle qui est sa fin dernière ?

Paul devint rêveur.

Ce jeune homme d’une haute moralité, droit, sincère dans ses amitiés, au caractère aimable, au cœur généreux, enthousiaste, à l’intelligence cultivée par une érudition profonde, se plongeait souvent dans des méditations sérieuses où son penchant vers l’agnosticisme complet l’entraînait. Bien des fois en suivant la marche ondulée des nuages se pelotonnant à l’horizon il s’était dit :

— Où allez-vous, flocons vaporeux ? là-bas, là-bas, au-dessus de Mars, de Saturne, d’Uranus, plus haut que les milliers d’imperceptibles étoiles que la science humaine n’a pas encore découvertes, y a-t-il un au-delà ?

Né d’une mère très pieuse, d’un père libre-penseur, Paul tenait de la première ce respect profond des choses religieuses, cette admiration de la piété vraie qui fait accomplir de si belles actions. Du second il avait hérité de ce doute cruel où tant de philosophes, tant de célébrités, tant d’é-