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le secret de la marquise

lire le reprenait plus fort. « Non, disait-il, je ne veux plus la voir, enlevez-la de devant moi, sa vue me fait mourir. »

On conçoit ce qui se passait alors chez la pauvre Louise.

Madame de Montreuil seule comprenant ce que son fils voulait dire, s’était souvent penché sur le jeune homme pour lui murmurer à l’oreille qu’il se trompait, que Louise n’était pas sa sœur ; mais il repoussait sa mère. Souvent il fallait l’aide des domestiques pour parvenir à le calmer, à le faire demeurer dans son lit.

Le médecin déclara que le jeune homme avait sans doute éprouvé un violent chagrin dont le souvenir le hantait et que si dans les rares moment de lucidité qu’il avait on ne parvenait pas à le faire pleurer, il serait impossible pour lui de répondre de la guérison. Peut-être, dit-il, recouvrera-t-il la santé, mais son esprit sera perdu pour toujours.

C’était une guérison pire que la mort.

Le temps s’écoulait ainsi dans cette horrible anxiété sans apporter aucun changement. Un jour que Louise était assise au chevet du malade, qu’elle avait veillé une semaine entière, sans avoir fermé l’œil, elle sentit ses forces l’abandonner ; brisée par le chagrin et le besoin de sommeil, elle crut qu’elle allait mourir. « Mon Dieu, dit-elle, en prenant un petit crucifix dans ses mains, que votre volonté soit faite, retirez-moi de ce monde si vous le voulez, mais rendez-lui la santé. » Puis ses paupières se fermèrent, épuisée elle tomba dans un sommeil de plomb.

Un grand changement s’était opéré chez la jeune fille depuis un mois ; les événements cruels