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qu’aucun de ses prédécesseurs, à sa place, n’aurait fait probablement, lord Aylmer le fit, sans doute conformément aux instructions du nouveau ministre des colonies, ou en sacrifiant toute considération personnelle à sa manière de comprendre son devoir, ou l’utilité publique, bien que l’idée de la convenance et de la dignité semble suggérer qu’il eût dû renoncer à son haut emploi, plutôt que de faire un tel acte d’abnégation de lui-même.

Dans son discours d’ouverture, le gouverneur apprend aux chambres, qu’en conséquence des changemens qu’il y avait eu dans les conseils de sa Majesté, (M. Stanley ayant été remplacé par M. Spring Rice[1],

  1. M. Spring Rice prouva pendant sa courte administration, qu’il n’était nullement l’homme qu’il fallait dans les circonstances. Il voulut réparer un tort léger, si c'en fût un, par une faute grave, en refusant de confirmer une nomination faite par lord Aylmer, et il eût à regretter de s’être imprudemment enfermé seul avec MM. Viger, Morin et Roebuck, pour conférer avec eux sur les affaires du Canada. Mais s’il était faible sur la politique, et manquait de prévoyance, il pouvait parler convenablement, comme le prouve le dialogue suivant :

    M. Hume (présentant une pétition de Québec, au soutien des 92 résolutions) : « Je suis convaincu que, tant que les Canadiens ne pourront pas régler eux-mêmes leurs affaires, ils ne seront pas satisfaits. »

    M. Spring Rice. « J’ai déjà manifesté le désir de concilier tous les partis en Canada, mais je dois réclamer contre les moyens qu’a employés un membre de la chambre, en faisant publier des choses propres à enflammer des esprits remuants… La lettre écrite par l’honorable membre est de nature à exciter le Canada contre la mère-patrie… Je ne sais trop si de tels propos sortis de la bouche d’un colon ne l’aurait pas rendu coupable de trahison et sujet à être poursuivi criminellement. Nul membre de la chambre ne peut

    tenir une pareille conduite sans mettre en danger les intérêts de l’Angleterre et du Canada. »

    M. Hume : Je me crois assez justifié d’avoir écrit cette lettre puisqu’on n’a fait aucun effort pour mettre à exécution les recommandations du comité de 1828. (Voir Rapport du comité de 1834). Si l’on ne redresse pas les griefs, la résistance sera permise. Je suis persuadé que si le gouvernement refuse de faire cesser les plaintes, il y aura bientôt une séparation.

    M. Spring Rice : « Il est extrêmement inconvenant à un homme qui parle en sûreté dans cette chambre, de mettre au jour des idées qui peuvent en jeter d’autres dans de si grands dangers. L’homme qui paisiblement et sûrement assis dans son cabinet, se sert d’un