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peu mesurés, de la conduite de M. de Saint-Luc, comme commandant des Sauvages. Nous ne déciderons pas si ce gentilhomme fit bien ou mal d’accepter le commandement des Sauvages, et de se rendre ainsi, en quelque sorte, responsable de leurs actes de barbarie ; mais nous dirons qu’il sut répondre en homme de cœur et d’honneur aux accusations du général anglais, et lui prouver que là où il blâmait les autres, c’était lui-même qui était à blâmer.

Les Sauvages dont les Américains croyaient avoir le plus à se plaindre étaient ceux des cinq tribus iroquoises ; aussi résolurent-ils de les mettre pour longtems hors d’état de leur nuire. Instruits de ce dessein, les Iroquois firent leurs préparatifs de défense, et rassemblèrent 1,800 guerriers, auxquels se joignirent deux cents Européens ; mais les forces envoyées contre eux, sous le général Sullivan, se montaient à 5,000 hommes. L’expédition ressembla à quelques unes de celles qui avaient été dirigées contre eux par les gouverneurs français du Canada. Attaqués dans leurs positions, ils s’enfuirent, après la perte de quelques hommes ; mais leur pays fut complètement ravagé. À l’exemple du comte de Frontenac, Sullivan fit détruire les villages, les habitations isolées, les blés, les fruits, les bestiaux, et d’une contrée riante et florissante fit une solitude désolée. « Ce fut, dit un auteur moderne, un affligeant spectacle pour l’humanité, que de voir ainsi refoulé vers la vie sauvage un grand nombre de peuplades qui commençaient à jouir d’un meilleur sort. Si quelques généreux défenseurs de la race proscrite élevèrent la voix en sa faveur, leurs accens de pitié ne furent point écoutés, et l’on étendit sur une race entière la punition encourue par quelques tribus. On prétendit que tous ces peuples ne pourraient jamais être amenés