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gneuries, dont par deux fois déjà ils s’étaient efforcés de faire changer la tenure : à plus forte raison n’auraient-ils pas voulu que les Canadiens s’établissent sur des terres situées au-delà des seigneuries, de peur qu’ils n’y portassent leur langue, leur lois et leur religion. Dans leur projet maniaque d’anglification, c’étaient des étrangers qu’ils appellaient de tout leur pouvoir sur ces terres incultes, sans s’embarrasser ni s’enquérir d’où ils venaient ni qui ils étaient, politiquement et moralement parlant, pourvu qu’ils parlassent la langue anglaise, et aimassent, ou feignissent d’aimer les lois anglaises de tenure, &c. Sans tenir moins peut-être aux formes et coutumes anglaises, le bureau des terres ne l’entendait pas tout-à-fait comme les marchands écossais de Québec et de Mont-réal : l’intention du gouvernement de la métropole avait bien été qu’une partie au moins des terres incultes fût vendue ; mais déjà, dans un nombre d’endroits, des gens des États-Unis s’étaient établis sans titres sur ces terres, et y avaient commencé des défrichemens. Quelques uns de ces intrus furent évincés ; d’autres restèrent, mais la plus grande partie des terres de la couronne demeurèrent incultes, par la faute de ceux qui en avaient le maniement. Le général Prescott s’était apperçu de leurs mauvaises manœuvres : il en écrivit en Angleterre ; et il en revint des instructions qui déplurent fort aux membres du bureau des terres, et particulièrement à leur président, le juge en chef Osgoode. Les autres membres du conseil prirent parti pour leurs collègues ; le corps entier s’opposa à la publication des nouvelles instructions.

Quoique comme homme intègre et ennemi de l’iniquité, le gouverneur Prescott dût désapprouver le conseil exécutif, au sujet des terres incultes, il ne s’en croyait pas moins obligé de penser et d’agir, à l’exemple