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Contes à soi-même. Le style de ces contes est fort loin du style aisé et rapide que M. de Régnier montre aujourd’hui dans ses romans. C’est au contraire une prose savante, solennelle, guindée même, et même aussi un peu difficile, et dans laquelle on retrouve tout le poète, avec ses mots préférés. Un nouveau recueil de contes : Le Trèfle noir, suivit, en 1895. C’est dans ce livre que commence, tant par le style que par le choix des sujets, le changement dont nous avons parlé plus haut, surtout dans le conte intitulé Hermocrate ou le récit qu’on m’a fait de ses funérailles. Le style est plus net, il y a moins de recherche dans les mots, et plus de vie dans le sujet. Quelques années plus tard, en 1897, M. de Régnier joindra les contes du Trèfle noir à huit contes nouveaux et les publiera ensemble sous le titre : La Canne de Jaspe. Il sera alors tout préparé pour écrire ses romans. M. d’Amercœur, Le Voyage à l’Ile de Cordic, Le Signe de la Clef et de la Croix, La Maison magnifique (ce sont quelques-uns des huit nouveaux contes joints à ceux du Trèfle noir) pourraient, à peu de chose près, par le style et par le sujet, être des chapitres de La Double Maîtresse.

En 1895, M. de Régnier publia une nouvelle série. de poèmes, Aréthuse, d’une aussi grande importance dans son œuvre que les Poèmes anciens et romanesques, publiés avant, et que Les Jeux rustiques et divins, publiés ensuite. Aréthuse est divisée en trois parties : Flûtes d’Avril et de Septembre, L’Homme et La Sirène, Flûtes d’Avril et de Septembre, la première et la troisième écrites en alexandrins, la deuxième en vers libres. On ne saurait vraiment choisir dans ce volume. Toutes les pièces en sont également belles par la pensée, par la rêverie, par les paysages tendres, tristes et profonds qu’elles suggèrent. Les mots, les constructions poétiques qu’affectionne M. de Régnier, les mélancoliques contrastes entre l’été et l’automne, la nymphe et le faune, la tristesse et la joie, le regret et le désir, s’y trouvent assemblés dans une harmonie sans cesse plus pénétrante, et des vers qu’on ne peut oublier.

On retrouve Aréthuse dans Les Jeux rustiques et divins, publiés en 1897, et qui contenaient quatre séries de nouveaux poèmes. C’est dans Les Jeux rustiques et divins que se trouve Le Vase, qui est peut-être le chef-d’œuvre de M. Henri de Régnier, et sûrement l’un des plus beaux poèmes de la poésie actuelle. Il s’y trouve aussi une série de petits poèmes, sous le titre d’Odelettes, — nous avons donné deux exemples dans notre choix, — d’une souplesse de rythme et d’une douceur incomparables.

C’est après Les Jeux rustiques et divins que se place le premier roman de M. de Régnier, La Double Maîtresse, paru en 1900. Il fut suivi la même année d’un nouveau livre de poèmes, Les Médaillés d’Argile. Les Médailles d’Argile sont dédiées à la mémoire