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POÈTES D’AUJOURD’HUI

Le Bressan : Le Poète Sébastien Charles Leconte, Besançon, imprimerie Cariage, 1904, in-18. — E. Ledrain : Critique littéraire. Nouvelle Revue, 1er décembre 1897. — Gaston Stiégler : Un Poète. Echo de Paris, 6 juin 1897.

Voir en outre le numéro du Beffroi d’août 1901, consacré spécialement à Sébastien Charles Leconte. (Articles de M. Thérèse Cussac, A.-M. Gossez, Léon Bocquet, Floris Delaltre. Illustr.).


SAPPHO


O toi vers qui mes sens allaient sans te connaître,
Tyran tant désiré qu’appelait tout mon être,
Par mon sang lourd d’amour si longtemps attendu,
Quand j’ai crié, vers toi qu’adorait mon génie,
Ma divine agonie,
O Phaon, c’est ta chair qui seule a répondu,

Pour dompter de ton front la beauté despotique,
J’ai jeté mon angoisse à la strophe impudique
Et tendu vainement, et jusqu’à les briser,
Les cordes de mon cœur et celles de ma lyre,
Sans voir en ton sourire
Une autre âme fleurir que l’âme du baiser.

Pour chanter ta puissance et pleurer ta caresse,
J’ai, du verbe des Dieux sacrilège prêtresse,
Dans la coupe du rythme où buvait mon orgueil
Versé tous les poisons merveilleux de ma fièvre,
Et l’autel de ma lèvre,
Profané par ta gloire, en gardera le deuil.

L’insomnie a brûlé mes douloureuses veines,
Et, dans la cruauté des étreintes vaines,
Tu ne devines pas, doux maître de mes sens,
Que vers toi, dans ce corps que l’amante te livre,
Quand ma forme t’enivre,
Mon immortalité fume comme un encens.

Et dans l’impérieux désir de tes prunelles,
Quand j’épiais le jour des clartés éternelles,
Tu crus que je cherchais, entre tes bras sauveurs,