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le débutant

feuille à son chef, pour aller reprendre son siège de simple député.

Les journaux ministériels firent tomber sur le ministre déchu, la responsabilité de l’agitation qui avait failli provoquer une crise politique. Au Populiste, Pierre Ledoux, le reporter des nouvelles édifiantes, jubilait ; il paraissait plus sale de contentement et ricanait maintenant, lui qui ne riait jamais, quand Jacques Vaillant, contre lequel il nourrissait une haine sournoise, se permettait quelque plaisanterie à son égard. Ce n’était plus le fils d’un ministre, et il espérait qu’on le jetterait bientôt à la porte, en même temps que son acolyte Mirot, tous deux étant trop pénétrés du déplorable esprit du siècle pour ne pas compromettre le journal.

Des signes certains annonçaient, du reste, que les deux amis ne moisiraient pas dans les bureaux du Populiste. Le gros Blaise Pistache n’avait jamais pardonné à Paul Mirot le peu de cas qu’il faisait de ses coups de plume et se plaignait sans cesse de lui à l’administration, appuyé par Jean-Baptiste Latrimouille, accusant ce jeune reporter d’indiscipline et d’imbécilité, parce qu’il osait répondre à ses injustes réprimandes, au lieu de courber humblement le front. Quant à Jacques Vaillant, c’était beaucoup plus grave, on insinuait dans les coins, à tous ceux qui voulaient bien prêter l’oreille, qu’il appartenait à des sociétés secrètes, et tout le monde commençait à le regarder de travers. L’événement se produisit encore plus tôt que ne l’avait prévu La Pucelle, qui, pour en avoir été la cause, n’en ressentit pas moins l’effet immédiat.

C’était le lendemain de la conférence de l’abbé Martinet, au Cercle Saint-Ignace, sur le modernisme, dont Ledoux avait été chargé de faire le compte-rendu. Le rédacteur des nouvelles édifiantes avait eu le soin de

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